Deuxième Partie:
Suite de la Première Partie:
Le journaliste: Pouvez-vous m’exposer le but de ce mouvement?
Srila Prabhupada : Le Mouvement pour la Conscience de Krishna a pour but de raviver en l’homme sa conscience originelle. Notre conscience présente procède de diverses désignations matérielles. L’un pense » Je suis américain », l’autre » Je suis français »; mais en réalité, nous ne répondons à aucune de ces désignations. Nous faisons partie intégrante de Dieu, c’est là notre véritable identité. Que chacun développe simplement cette conscience, et tous les problèmes du monde seront résolus car nous comprendrons alors l’unité de tous les êtres en tant qu’âmes spirituelles, toutes de même nature, bien qu’elles aient revêtu des vêtements différents. Voilà ce qu’enseigne la Bhagavad-gita.
La conscience de Krishna est en fait un processus de purification (sarvopadhi-vinirmuktam) qui permet de se libérer de toutes désignations matérielles (tat-paratvena nirmalam). Les activités ainsi accomplies dans une conscience pure, avec des sens purifiés, nous mènent alors jusqu’à l’ultime perfection de la vie. Cette méthode est d’ailleurs très simple; inutile de devenir un grand philosophe, savant ou autre, il suffit de chanter le Saint Nom du Seigneur, étant entendu que Sa Personne, Son Nom, Ses Attributs sont tous absolus.
Enfin, la conscience de Krsna constitue une grande science. Malheureusement, les universités ne lui réservent pas la moindre place. Voilà pourquoi nous invitons tous ceux qui désirent sincèrement le bien de l’humanité à étudier ce Mouvement afin d’en saisir l’importance, et si la chose est possible, à nous offrir ensuite leur coopération en prenant une part active à son développement.
Les problèmes de ce monde seront alors résolus; c’est le verdict de la Bhagavad-gita, l’oeuvre la plus pure et la plus importante qui soit dans le domaine de la connaissance spirituelle. Beaucoup parmi vous ont entendu parler de la Bhagavad-gita, et elle est d’ailleurs reconnue par tous les grands acharyas (grands maîtres spirituels) de l’Inde – Ramanujacarya, Madhvacarya, Sri Chaitanya Mahaprabhu et bien d’autres encore. Puisque vous représentez les grands quotidiens d’information,je vous demande de faire de votre mieux pour saisir l’importance de ce Mouvement de Krishna, pour le bien de l’humanité entière.
Le journaliste: Pensez-vous que votre Mouvement représente la seule voie qui mène à Dieu?
Srila Prabhupada : Oui.
Le journaliste: Qu’est-ce qui vous permet de l’affirmer ainsi?
Srila Prabhupada : Je le tiens des autorités en la matière et de Krsna, Dieu Lui-même, qui déclare:
mâm ekam saranam vraja
aham tvâm sarva-pâpebhyo
moksayisyâmi mâ sucah
« Laisse-là toute forme de religion et abandonne-toi simplement à Moi. Toutes les suites de tes fautes, Je t’en affranchirai. N’aie nulle crainte. »
Bhagavad-gita {18.66}
Le journaliste: Cet abandon implique-t-il que l’on doive quitter sa famille?
Srila Prabhupada : Pas du tout.
Le journaliste: Supposons que je m’apprête à recevoir l’initiation spirituelle. Faut-il que je vienne habiter au temple?
Srila Prabhupada : Pas obligatoirement.
Le journaliste: Je pourrai donc rester chez moi?
Srila Prabhupada : Mais bien entendu.
Le journaliste: Et mon travail, me faudra-t-il l’abandonner?
Srila Prabhupada : Non, tout ce qu’il vous faut abandonner, ce sont vos mauvaises habitudes, et vous devez en outre chanter le mantra Hare Krishna sur ce chapelet – voilà tout.
Le journaliste: Exigez-vous une participation financière?
Srila Prabhupada : Libre à vous de contribuer de la sorte si tel est votre désir. Mais sinon, cela n’a pas d’importance car nous ne dépendons des contributions de personne, nous dépendons de Krishna.
Le journaliste: Alors réellement, je n’aurais rien à payer?
Srila Prabhupada : Non, rien du tout.
Le journaliste: Est-ce là un des points essentiels qui permettent de différencier un guru authentique d’un imposteur?
Srila Prabhupada : Effectivement, car un guru n’a rien d’un homme d’affaires; il représente Dieu dont il transmet fidèlement l’enseignement et aucune autre parole ne sort jamais de sa bouche.
Le journaliste: Peut-on s’attendre, par exemple, à rencontrer un guru voyageant en Rolls Royce et séjournant dans la suite princière d’un hôtel de grande classe?
Srila Prabhupada : On nous offre parfois de demeurer dans les grands hôtels, mais d’ordinaire, nous préférons rester dans nos propres temples – une centaine dans le monde entier; comme cela nous n’avons pas besoin d’aller à l’hôtel.
Le journaliste: Je ne cherchais pas à vous accuser. Je voulais simplement illustrer le bien-fondé de votre mise en garde. La recherche spirituelle est tout à fait au goût du jour, et beaucoup entendent profiter de cette « mode du guru » pour grossir leur compte en banque.
Srila Prabhupada : Est-ce que selon vous la vie spirituelle exige que l’on fasse voeu de pauvreté?
Le journaliste: En vérité, je n’en sais trop rien.
Srila Prabhupada : Un indigent peut très bien être un parfait matérialiste, et d’autre part, on rencontre des riches très avancés en matière de spiritualité. La vie spirituelle ne dépent pas de la pauvreté ou de la richesse, elle transcende ces dualités. Prenez l’exemple d’Arjuna: tout prince qu’il était, il n’en demeurait pas moins pur dévot du Seigneur. En outre, Krishna enseigne dans la Bhagavad-gita, evam parampara-praptam imam rajarsayo viduh: « Savoir suprême, transmis de maître à disciple, c’est ainsi que les saints rois l’ont reçu et réalisé. » Autrefois, donc, les rois, du fait de leur sainteté, pouvaient comprendre la science spirituelle; par conséquent, la vie spirituelle ne dépend d’aucune condition matérielle et reste accessible à tous, au roi comme au indigent. Mais d’ordinaire, les gens ignorent tout de la vie spirituelle, et c’est pourquoi ils nous critiquent sans raison. Si je vous demandais vos conceptions par exemple, que me répondriez-vous?
Le journaliste: Rien de défini à vrai dire.
Srila Prabhupada : Et malgré votre ignorance en la matière, vous donnez néanmoins votre opinion. Avant tout, vous devriez savoir ce qu’on entend par vie spirituelle. Elle commence lorsque vous comprenez que vous n’êtes pas le corps. En percevant la différence qui existe entre le moi et le corps, vous réalisez que vous êtes une âme spirituelle (aham brahmasmi).
Le journaliste: Pensez-vous que cette science devrait faire partie intégrante de l’éducation de tous?
Srila Prabhupada : Certainement. On devrait commencer par expliquer aux gens leur véritable identité; sommes-nous ce corps, ou bien quelque chose d’autre? L’éducation débute avec cette notion; or aujourd’hui, tous s’identifient à leur corps. Celui que le destin fait naître dans un corps américain va penser, « Je suis américain », ce qui revient à dire en fait « Je suis une chemise bleue, ou rouge » pour la simple raison que vous portez un vêtement de cette couleur. De toute évidence, vous n’êtes pas une chemise mais un être humain. Dans le même ordre d’idée, le corps matériel est semblable à une chemise qui recouvre la véritable personne – l’âme spirituelle. Si nous nous identifions à notre « vêtement de chair », cela signifie que nous n’avons reçu aucune éducation d’ordre spirituel.
Le journaliste: Et vous estimez qu’il faut donner cette éducation à l’école?
Srila Prabhupada : Oui – dans les écoles, les lycées, les universités; il existe d’innombrables ouvrages sur la question – un trésor de connaissance. Mais pour cela, il faut, et il suffit, que les dirigeants de la société se tournent vers nous et étudient ce Mouvement.
Le journaliste: Certains de vos disciples n’avaient-ils pas été auparavant fourvoyés par de faux gurus?
Srila Prabhupada : Si, malheureusement.
Le journaliste: Leur vie spirituelle en a-t-elle subi un préjudice quelconque?
Srila Prabhupada : Non, car ils cherchaient sincèrement une certaine forme de vie spirituelle. Il faut leur reconnaître ce mérite. Dieu Se tient dans le coeur de chaque être, et Il aide sans attendre quiconque souhaite sincèrement rencontrer un guru authentique.
Le journaliste: N’avez-vous jamais tenté de mettre fin aux agissements des faux gurus, en faisant pression sur eux pour qu’ils soient mis à pied en quelque sorte?
Srila Prabhupada : Non, ce n’est pas mon but.
J’ai commencé ce Mouvement simplement en chantant le mantra Hare Krishna. J’allais dans un parc à New York, le Tompkins Square Park, et très vite, plusieurs personnes s’approchèrent; c’est ainsi que le Mouvement pour la Conscience de Krishna s’est peu à peu développé. Beaucoup ont joint ses rangs, nombreux aussi ceux qui ont tourné le dos, mais la fortune a souri aux preneurs.
Le journaliste: Ce doit être l’expérience malheureuse d’un faux guru qui fait naître la méfiance, n’est-ce pas? Si votre dentiste s’avère un charlatan et qu’il vous abîme une dent, vous allez probablement hésiter avant de consulter un autre dentiste!
Srila Prabhupada : Naturellement; lorsqu’on vous trompe, vous devenez méfiant. Mais le fait d’être une fois victime d’un escroc ne signifie pas pour autant que vous ne rencontrerez jamais de tels individus. Cherchez quelqu’un qui soit sincère. Pour entrer en contact avec ce Mouvement, vous devez recevoir la miséricorde spéciale de Krishna, ou bien posséder déjà une bonne maîtrise de cette science. Selon la Bhagavad-gita, les chercheurs authentiques sont très rares: manusyanam sahasresu kascid yatati siddhaye Parmi des milliers d’hommes, un seul, peut-être, sera intéressé par la vie spirituelle (Bhagavad-gita 7.3). D’une manière générale, les gens ne vivent que pour manger, dormir, s’accoupler et se défendre contre tout ce qui les dérange. Dans de telles conditons, peut-on s’attendre à avoir une audience très large. On peut facilement se rendre compte que les hommes dans leur masse ont perdu leur intérêt pour la spiritualité, et les seuls vraiment concernés deviennent presque toujours victimes d’imposteurs. En fait, on ne peut pas juger un Mouvement simplement au nombre des disciples; son succès dépend de l’authenticité ne serait-ce que d’un seul de ses membres. Ce n’est pas une question de quantité, mais bien de qualité.
Le journaliste: Peut-on estimer la proportion de « victimes »?
Srila Prabhupada : Pratiquement tout le monde. [Rires] Inutile d’évaluer un chiffre; presque tous sans exception.
Le journaliste: Est-ce à dire des milliers de personnes…
Srila Prabhupada : Des millions! Des millions qui en fait n’ont eu que ce qu’ils désiraient. Dieu est omniscient, Il connaît donc les désirs de chacun, et puisqu’Il est présent dans votre coeur, si vous cherchez un charlatan, Il vous en enverra un.
Le journaliste: Est-ce que tout homme peut atteindre ce niveau de perfection dont vous parliez tout à l’heure?
Srila Prabhupada : Oui, et cela en un instant; il suffit de le vouloir. Mais personne n’y aspire vraiment, voilà tout le problème. Krishna dit dans la Bhagavad-gita, sarva-dharmam parityajya mama ekam saranam vraja. « Abandonne-toi simplement à Moi ». (Bhagavad-gita {18.66})Mais qui voudra bien s’abandonner à Dieu? Ils vont tous dire: « M’abandonner à Dieu! Pourquoi? Je préfère l’indépendance. » Sinon, il s’agit de l’affaire d’une seconde, pas plus. Le seul ennui, c’est que personne n’est candidat.
Le journaliste: Lorsque vous dites que beaucoup veulent être trompés, entendez-vous par là que, sans avoir l’intention de renoncer aux plaisirs matériels, ils croient néammoins mener une vie spirituelle en chantant un mantra quelconque ou en se promenant une fleur à la main?
Srila Prabhupada : Voilà. Exactement comme si un malade pensait: « Mes habitudes malsaines, je les garde, et je vais quand même retrouver la santé. » C’est contradictoire. Avant tout, il faut recevoir une formation spirituelle, et ce n’est pas un domaine que l’on peut saisir en quelques minutes de conversation. Il existe beaucoup de traités de philosophie et de théologie, mais personne ne s’intéresse à ces choses; voilà le problème. Si vous abordez, par exemple la lecture du Srimad-Bhagavatam, qui est une oeuvre volumineuse, vous pourrez mettre plusieurs jours avant d’en comprendre ne serait-ce que la première ligne. Cet ouvrage décrit pourtant ce qu’est Dieu et la Vérité Absolue, mais cela n’intéresse personne. Et si, par hasard, quelqu’un manifeste un tant soit peu d’attrait pour la vie spirituelle, il ne désire en général que des résultats rapides et faciles à obtenir. Voilà pourquoi on le trompe. En fait, selon la civilisation védique, austérités et sacrifices sont le propre de la vie de l’homme. Dans les temps védiques, les garçons recevaient une formation de brahmacaris, laquelle proscrivait toute vie sexuelle jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans. Qu’en est-il aujourd’hui d’une telle éducation? On appelle brahmacari un étudiant qui vit au gurukula (l’école du maître spirituel) dans la continence la plus totale, et qui obéit aux ordres de son guru. Mais de nos jours, les écoles et les lycées éduquent les enfants à la vie sexuelle dès le plus jeune âge, et il n’est pas rare que les garçons et les filles de douze ou treize ans aient des relations sexuelles. Comment pourraient-ils avoir une vie spirituelle? La vie spirituelle consiste à accepter volontairement certaines austérités au profit de la réalisation de Dieu. C’est la raison pour laquelle nous insistons pour que nos disciples initiés renoncent à la consommation de viande, à toute vie sexuelle illicite, aux excitants et substances enivrantes, et aux jeux de hasard. Sans ces restrictions, nulle « méditation par le yoga », nulle prétendue discipline spirituelle ne peut être authentique. Il ne s’agit alors que d’une entente commerciale entre trompeurs et trompés.
Le journaliste: Je vous remercie beaucoup.
Srila Prabhupada : Hare Krishna.
Catégories :Le guru ou maître spirituel.