par Mathuresa dasa
Il y a un siècle, aux débuts de l’industrie automobile, personne ne prévoyait le problème de la pollution. Au contraire, certains accueillirent ces nouveaux véhicules comme une solution à la pollution et à certaines maladies urbaines.
A la fin du siècle dernier, les charrettes tirées par les chevaux et les voitures aux roues jantées de fer créaient un fracas parfois intolérables en se déplaçant sur le pavé. Le fumier des chevaux parsemait les rues, et les gaz qui en émanaient irritaient le nez et les poumons. Les excréments secs des chevaux produisaient une sorte de poussière que les autorités médicales de l’époque tenaient pour responsable de la dysenterie et de la diarrhée dont souffraient les enfants des villes. On pensait aussi que le tétanos était introduit dans les villes par l’intermédiaire du fourrage de cheval. Plus de trente maladies contagieuses, dont la typhoïde, étaient également imputées aux chevaux et à leurs excréments.
On soutenait en général que l’arrivée de l’automobile éliminerait les chevaux, le fumier, les écuries malodorantes et le pavé. En 1899, le « Scientific American » écrit: » On ne saurait surestimer l’amélioration des conditions de vie dans la ville que va susciter l’adoption générale de l’automobile: des rues propres, sans odeurs ni poussière, avec des véhicules aux pneux en caoutchouc se déplaçant en silence. Une grande partie de la nervosité et de la tension citadine sera ainsi éliminée. »
Non seulement l’automobile réduirait-elle le stress urbain, mais elle créerait une alternative à la vie citadine. Elle permettrait aux travailleurs de passer la journée dans leur usine ou bureau situés dans la ville, et de vivre à la campagne. En 1904, on trouve ceci dans un journal: « Imaginez une race plus saine de travailleurs qui, en fin d’après-midi, se rendent confortablement à leur petite ferme ou maison de campagne dans leur automobile. » Henry Ford disait même: « Nous résoudrons les problèmes de la ville en quittant la ville. »
Le développement de l’industrie automobile déclenche bien une explosion de l’immobilier dans les banlieues, ainsi qu’un important essor des industries de l’acier et du plastique entre autres. De 1910 à 1917, 15 millions de Modèles T sortirent des usines Ford aux Etats-Unis alors que dans le pays, on construisait des centaines de milliers de kilomètres de route et de l’autoroute. Cette période vit également un important développement de l’industrie automobile en Europe, bien qu’à une échelle moindre. Directement et indirectement, cet essor contribua largement à la prospérité de l’Amérique et de l’Europe.
L’utilisation massive de l’automobile devait néanmoins avoir des conséquences imprévues et indésirables. Les trois plus importantes furent la pollution de l’air, les embouteillages et les accidents de la route. La masse de véhicules qui entrent dans les villes et qui en sortent aux heures de pointe crée des embouteillages auxquels il ne semble pas y avoir de remède.
Mais la conséquence la plus pénible de l’utilisation massive de l’automobile est le grand nombre d’accidents de la route. En 2002 et en 2003, on a dénombré par an dans le monde 1,2 millions de morts sur la route et 50 millions de blessés, et cela a coûté 407 milliards d’euros[1]. Le record du monde est détenu par la Russie avec 12 accidents pour 10 000 voitures et 35 000 morts par an.
Néanmoins, la voiture est si intimement liée à notre vie quotidienne qu’il semble pratiquement impossible de vivre sans elle. Non seulement elle nous permet de vivre à des kilomètres de notre lieu de travail, de l’école de nos enfants, de nos lieux de loisir, mais elle nous y force. L’industrie automobile à compartimenté notre vie et nous a rendu dépendants d’un véhicule cher et dangereux. On ne peut plus aujourd’hui passer ses jours chez soi auprès de sa famille.
Malgré notre utilisation intensive de la voiture, il se peut que nous ayons un jour à nous en passer, du moins dans une certaine mesure. Au rythme actuel de consommation d’essence, certains craignent que nous ne puissions continuer longtemps de la sorte. La perte de l’automobile serrait-elle une régression ou une bénédiction?
Le Srimad-Bhagavatam souligne que ce que nous considérons comme le progrès, c’est-à-dire l’amélioration des conditions de vie, améliore bien certains aspects de notre vie, mais en dégrade d’autres. Et les mauvais effets de ce progrès l’emportent sur ses bons côtés. La vitesse de l’automobile supérieure à celle des voitures tirées par des chevaux, est par exemple à l’origine d’une sécurité moindre. Et d’autre part personne aujourd’hui ne penseraient à contester le fait que les gaz d’échappement des voitures sont pour une part importante responsable de l’effet de serre sur la planète.
Les progrés matériels sont non seulement sans fruits véritables, mais il s’avère que les effets sont en fait contraires à ceux qui étaient escomptés. Par exemple, la menace sur la santé des citadins que constitue la pollution engendrée par les voitures résulte d’un effort en vue d’améliorer la santé et l’environnement dans les villes. Et si nous pensons pouvoir éliminer les gaz d’échappement des voitures en adoptant des véhicules électriques ou à énergie solaire, nous trouverons bien vite d’autres inconvénients à ces nouvelles formules. Ainsi va le progrès matériel.
En plus de son échec intrinsèque, le progrès matériel nous détourne du progrès spirituel. Les Vedas recommandent donc de vivre simplement, paisiblement, et de consacrer son énergie, son temps et son intelligence au service de Krishna, Dieu, la Personne Suprême. C’est ainsi que l’on se libérera du cycle des morts et des renaissances. Et à moins de se libérer de ce cycle, il ne peut être question d’améliorer nos conditions de vie.
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