Personne n’est insensible à la beauté sous ces différentes formes; un paysage de campagne vallonné, un meuble raffinée, une oeuvre d’art, un château majestueux ne nous laissent pas indifférents. Mais plus encore que les objets inertes ce sont les êtres vivants qui nous émeuvent le plus, et plus particulièrement nos semblables; la fraîcheur d’un sourire, la délicatesse d’un visage, la profondeur d’un regard, l’élégance d’un geste.
Et parmi tous les êtres il en est un dont la beauté excelle tous les autres; il s’agit de Krishna, Dieu, la Personne Suprême. Krishna étant Dieu c’est à dire l’origine et la source de tous ce qui est (BG 10-8), Il est aussi à l’origine de la beauté, et en tant que telle Sa beauté excelle et surpasse celles de tous les autres êtres -même celles des Formes suprêmes de Ses incarnations tels Visnu ou Narayana.
Dans le texte suivant intitulé « La beauté de Krishna », extrait des « Enseignements du Seigneur Chaitanya »(Chapitre 10) de Sa Divine Grâce A.C. Bhaktivedanta Swami Prabhupada, sont relatés les enseignements de Sri Chaitanya Mahaprabhu, « L’avatara le plus magnanime », à Sanatana Gosvami, Son disciple directe. Sri Chaitanya Mahaprabhu est décrit par Rupa Gosvami comme étant l’avatara de Krishna le plus magnanime car Il distribue librement et généreusement Krishna à tous, sans discrimination et sans condition.
Avant qu’Il commence Son mouvement du sankirtana, il y a 500 ans, le trésor de l’amour de Dieu (le Prema-bhakti) était scellé mais le Seigneur Chaitanya a brisé le sceau, pillant et distribuant le contenu trés largement à tous. Il nous permet ainsi, de par Sa miséricorde sans cause, d’accéder à ce don inestimable, alors que dans l’âge de kali la condition de l’homme est considérée trés dégradée par rapport aux autres âges (satya, treta et dvapara yugas) et qu’ainsi, pratiquement parlant, personne n’est vraiment qualifié pour le recevoir. Mais grâce à Sri Caitanya Mahaprabhu et un de Ses plus illustres représentant et acarya : Sa Divine Grâce A.C. Bhaktivedanta Swami Prabhupada, l’impossible devient possible. Srila Prabhupada ne disait-il pas que le mot « impossible » pour un vaisnava se trouve dans le dictionnaire d’un fou.
Le caractère unique du Chaitanya-caritamrita, dont sont tirés « Les enseignements du Seigneur Chaitanya » de Srila Prabhupada, est qu’il nous permet de plonger dans la vision de Dieu la plus extraordinaire, mais aussi la plus accomplie et exaltée qui soit : Krishna, l’Infiniment fascinant, à Vrindavana, dans le plus grand « paradis spirituel » qui soit.
Jagadananda das pour « Retour à Krishna »
On connaît Krishna sous le nom de Madana-mohana parce qu’Il subjugue le mental de Cupidon en accordant Ses faveurs aux jeunes filles de Vraja et en acceptant leur service de dévotion. Après avoir anéanti l’orgueil de Cupidon, le Seigneur Se livre à la danse rasa (Rasa-lila), dans laquelle Il S’impose comme le « nouveau » Cupidon. On L’appelle également Madana-mohana du fait de Son aptitude à capturer le mental des femmes grâce à cinq flèches : la forme, le goût, l’odeur, le son et le toucher. Les perles du collier qui se balance au cou de Krishna sont aussi blanches que des canards immaculés, et la plume de paon qu’Il porte dans Ses cheveux ressemble à un arc-en-ciel. Son vêtement jaune rappelle l’éclair dans le ciel, et Krishna, les nuages nouvellement formés. Les gopis sont telles des clochettes à Ses pieds. Lorsqu’un nuage déverse ses pluies sur un champ ensemencé, on dirait Krishna abreuvant le coeur des gopis en faisant pleuvoir le nectar de Ses Divertissements. À la saison des pluies, on peut de même apercevoir dans le ciel des vols de canards et des arcs-en-ciel. À Vrindavana, Krishna Se déplace librement au milieu de Ses amis tel un jeune pâtre, et lorsqu’Il joue de Sa flûte, tous les êtres vivants – mobiles et immobiles – sont envahis d’extase au point d’en frémir et ne pouvoir réprimer leurs larmes.
La puissance amoureuse de Krishna trône au sommet de toutes Ses excellences, Lui le Maître de toute richesse, force, renommée, beauté, connaissance et renoncement. D’entre ces attributs, Sa beauté est en effet d’une perfection telle qu’elle suscite un attrait des plus intimes. De plus, cette beauté indicible, source des sentiments amoureux les plus vifs, n’existe de toute éternité qu’en Krishna, et Lui seul, tandis que Ses autres excellences sont également présentes dans Sa Forme de Narayana.
Décrivant ainsi l’incomparable excellence de l’attrait divinement sensuel qu’exerce Krishna, le Seigneur Chaitanya fut submergé d’extase et, saisissant les mains de Sanatana Gosvami, Il entreprit de proclamer l’immense fortune des jeunes filles de Vraja en citant un verset du Srimad-Bhagavatam (10.44.14) :
» Quelles austérités ont dû accomplir les jeunes filles de Vrindavana pour être en mesure de boire le nectar de Krishna, qui incarne toute beauté, toute puissance, toute opulence et toute renommée, et dont l’éclat est le centre de toute splendeur. «
Le Corps de Krishna, qui incarne l’éternelle beauté de la jeunesse, évolue tel les vagues d’un océan de beauté. Le son de Sa flûte crée un tourbillon qui, de concert avec les vagues de Ses mouvements, fait frémir le coeur des gopis comme les feuilles sèches d’un arbre; une fois tombées aux pieds pareils-au-lotus de Krishna, elles ne s’en relèvent jamais plus. La beauté de Krishna s’avère incomparable, nul ne pouvant Le surpasser ni même L’égaler à cet égard. Il représente l’Origine de tous les avataras, y compris Narayana. Sinon, comment la Déesse de la fortune – compagne constante de Narayana – pourrait-Elle délaisser Celui-ci pour se livrer à des austérités en vue d’obtenir la compagnie de Krishna? Telle est l’incomparable beauté de Krishna, l’éternel réservoir dont émane toute beauté.
L’attitude des gopis est pareille à un miroir où le reflet de la beauté de Krishna s’accroît à chaque instant. Et Krishna et les gopis font s’accroître leur sublime beauté à tout instant, et ainsi grandit entre eux une compétition transcendantale. Nul ne saurait apprécier la beauté de Krishna par l’accomplissement prescrit de son devoir d’état, ni par l’austérité, le yoga, la culture du savoir ou la prière. Seuls les êtres établis au niveau absolu de l’a mour pour Dieu – qui pratiquent le service de dévotion par pur amour pour Lui – peuvent goûter l’infinie beauté de Krishna. Cette beauté constitue l’essence même de toutes les excellences et n’est révélée qu’à Goloka Vrindavana. La compassion, la renommée et les autres excellences présentes en la Personne de Narayana Lui sont toutes octroyées par Krishna; mais la douceur et la magnanimité de Krishna n’existent pas chez Narayana. On ne les retrouve qu’en Krishna, et Lui seul.
Le Seigneur Chaitanya savourait tous les versets du Srimad-Bhagavatam qu’Il expliquait à Sanatana, et plus particulièrement le passage suivant :
» Les gopis goûtaient la beauté de Krishna telle une consécration perpétuelle de l’enchantement. Elles prenaient plaisir à admirer la beauté de Son visage, de Ses délicates oreilles parées de boucles, de Son large front et de Son sourire. Absorbées dans cette contemplation, elles décriaient le démiurge Brahma de les avoir dotées de paupières dont le battement les privait momentanément de la vision de Krishna. «
(S.B., 9.24.65)
L’hymne védique du nom de Kama-gayatri* décrit le visage de Krishna comme le souverain de toutes les lunes. Le langage métaphorique fait état de nombreuses lunes, mais elles sont toutes réunies en Krishna. On compte ainsi vingt-quatre lunes et demie, associées à Sa bouche, à Ses joues, aux marques de pulpe de santal qui ornent Son corps, aux extrémités de Ses doigts et de Ses orteils, qui toutes gravitent autour de la figure centrale qu’est Krishna.
* Puisse notre méditation se porter vers le Maître des sens, porteur de flèches de fleurs. Méditons sur Lui, le Cupidon Suprême et source d’inspiration.
La danse des pendants d’oreille, des yeux et des sourcils de Krishna exerce un irrésistible attrait sur les jeunes filles de Vraja. Les activités du service de dévotion font grandir le sentiment dévotionnel. Or, qu’y a-t-il à contempler au-delà du visage de Krishna? Et comme deux yeux ne suffisent pas à embrasser toute la beauté de Krishna, comment ne pas se sentir à la fois impuissant et désespéré ? Ce sentiment de désolation s’estompe cependant quelque peu lorsqu’on l’attribue à l’incompétence du créateur. D’où cette complainte :
» Loin d’avoir des milliers d’yeux, je n’en possède que deux; or, voilà qu’ils sont constamment entravés par le battement de mes paupières. J’en déduis que l’intelligence fait défaut à l’architecte de ce corps. Ignorant tout de l’art de la félicité, il n’est qu’un créateur prosaïque, incapable de faire en sorte que je puisse sans cesse ne voir que Krishna. «
Le mental des gopis se délecte constamment de la douceur du Corps de Krishna. Océan de beauté, Son visage angélique et Son sourire séduisant – sans oublier l’éclat de Son Corps – exercent sur elles une fascination sans limite. Le Krishna-karnamrita décrit ces trois éléments comme étant respectivement suave, encore plus suave et on ne peut plus suave. On parle de convulsion lorsque le corps purifié subit trois formes d’altération. C’est ainsi que, bouleversé à la vue de la beauté du Corps de Krishna, de Son visage et de Son sourire, le dévot accompli baigne dans un océan de convulsions mystiques qui, souvent, demeurent sans traitement, tout comme les convulsions ordinaires contre lesquelles un médecin ne peut rien, au point de refuser à son patient le verre d’eau qu’il réclame pour étancher sa soif.
Le dévot ressent toujours davantage l’absence de Krishna, car il lui est alors impossible de s’enivrer du nectar de Sa beauté. Lorsque résonne le son sublime de la flûte de Krishna, l’insoutenable désir du dévot de l’entendre transperce les enveloppes de l’univers matériel pour pénétrer dans le monde spirituel, où les sonorités divines de la flûte se glissent dans l’oreille des disciples des gopis. Le son de cette flûte ne quitte jamais l’oreille des gopis et ne cesse d’accroître leur félicité. Dès qu’elles l’entendent, aucun autre son ne peut plus les atteindre, si bien qu’elles ne savent plus répondre comme il se doit aux propos que leur tiennent les membres de leur famille, complètement envoûtées qu’elles sont par la beauté de ce qu’elles entendent. Ainsi le Seigneur Chaitanya a-t-Il décrit la nature transcendantale de Krishna, de Ses émanations, de l’éclat de Son corps et de tout ce qui se rattache à Sa Personne. En somme, Il n’a fait que dépeindre Krishna tel qu’Il est. Puis – Krishna incarnant l’essence de tout ce qui est -, Il entreprit d’expliquer le seul et unique processus qui permet d’accéder à Krishna, à savoir le service de dévotion. Telle est la conclusion de tous les textes védiques, ainsi que l’ont confirmé les sages :
» Quiconque consulte les Vedas ou les Puranas (considérés comme des écrits frères) afin de déterminer la voie de la réalisation spirituelle constatera qu’ils livrent tous la même conclusion : Dieu, la Personne Suprême, Krishna, est le seul objet d’adoration. «
Krishna est la Vérité Absolue, l’Être Suprême, établi dans Sa puissance interne, appelée svarupa-shakti, ou atma-shakti, et décrite dans la Bhagavad-Gita. Il Se multiplie en d’innombrables formes dont certaines dites personnelles et d’autres, distinctes. Ainsi accomplit-Il Ses Divertissements sur toutes les planètes spirituelles de même qu’au sein des univers matériels.
Les émanations distinctes de Ses formes sont désignées du nom d’êtres vivants (jivatma ou âmes) et on les subdivise en deux classes suivant leur rapport aux énergies du Seigneur, les uns étant éternellement libérés et les autres, éternellement conditionnés. Les premiers n’entrent jamais en contact avec la nature matérielle et ne connaissent pas l’existence temporelle. Éternellement absorbés dans la conscience de Krishna, ou le service de dévotion au Seigneur, on les compte parmi les compagnons de Krishna. Leur seul bonheur tient au service d’amour spirituel qu’ils offrent à Krishna. À l’inverse, les êtres éternellement conditionnés se détournent à jamais de ce service d’amour, et subissent par conséquent les trois formes de souffrance inhérentes à l’existence matérielle. En raison de leur perpétuelle attitude de distanciation face à Krishna, l’énergie matérielle leur accorde deux types de corps : l’un grossier, et formé des cinq éléments, l’autre subtil, et formé du mental, de l’intelligence et de l’ego. Recouvert par ces deux corps, l’âme conditionnée est à jamais en proie aux trois formes de souffrance matérielle et aux assauts de six ennemis (la colère, la concupiscence, l’avidité, la démence, l’illusion et l’envie.). Telles sont les affres qui rongent sans fin l’âme conditionnée. Ainsi affligé et conditionné, l’être vivant erre sans cesse de par l’univers, tantôt promu à des systèmes planétaires supérieurs, tantôt contraint de transmigrer sur des systèmes inférieurs, si bien qu’il finit par trouver normal de vivre de la sorte. Il ne peut être affranchi de son mal que lorsqu’il rencontre et suit l’exemple du médecin par excellence, le maître spirituel authentique. Quand l’âme conditionnée adhère avec foi aux instructions d’un tel maître, elle se voit guérie de sa fièvre matérielle et accède au plan de la libération, où elle renoue avec le service de dévotion à Krishna pour enfin retourner auprès de Lui, en sa demeure première.
L’être conditionné doit prendre conscience de sa véritable nature et prier le Seigneur en ces termes :
» Combien de temps encore devrai-je vivre sous l’empire de la colère et de la concupiscence, pour ne nommer que ces fléaux ? «
Loin d’être compatissants, les maîtres que sont la colère et la concupiscence réduisent à jamais l’âme conditionnée à l’esclavage. Mais lorsque celle-ci retrouve sa véritable conscience, la conscience de Krishna, elle quitte ces mauvais maîtres pour s’en remettre à Krishna, cherchant sincèrement refuge auprès de Lui et Le priant de l’engager dans Son service d’amour spirituel.
Les Écritures védiques font parfois grand état de l’ action intéressée, du yoga des pouvoirs ou de la quête spéculative du savoir comme autant de méthodes de réalisation du soi; mais elles n’en reconnaissent pas moins la supériorité du service de dévotion. En d’autres mots, le service de dévotion à Krishna représente la voie de réalisation spirituelle la plus parfaite. On recommande d’ailleurs de s’y consacrer directement. L’action intéressée, la méditation et la spéculation philosophique ne sont pas des méthodes directes de réalisation du soi car, dénuées de dévotion, elles ne peuvent mener à la plus haute perfection spirituelle. À vrai dire, toutes dépendent, en dernière analyse, de la pratique du service de dévotion.
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