visite Vrindavana
Une autre gopi, révoltée par l’absence de Krsna, prit la parole: «Mon cher Balaramaji, certes nous ne sommes que filles de village, et Krsna a pu facilement nous tromper, mais les femmes de Dvaraka? Sont-elles aussi naïves que nous? Ces femmes de la ville de Dvaraka sont bien plus rusées et intelligentes! Je serais bien surprise de les voir crédules devant Krsna et trompées par ses paroles».
Une autre gopi: «Mon cher ami, Krsna est fort adroit dans l’usage de la parole. Nul dans cet art ne peut rivaliser avec lui. Il met dans ses mots tant de couleur, parle avec tant de douceur que n’importe quelle femme verrait son coeur en déroute. Il a porté à la perfection l’art de séduire en souriant. Quand elles voient ce sourire, les femmes deviennent comme folles et se donneraient à lui sans hésiter un instant».
A ces mots, une autre gopi déclara: «Mes amies, pourquoi donc parler de Krsna? Si vous voulez tuer le temps, prenez alors un autre sujet. Ce cruel Krsna se passe de nous, pourquoi ne pas nous passer de lui? Certes, sans nous Krsna passe ses jours dans la joie, mais nous, sans lui, ne pouvons être heureuses».
A mesure qu’elles parlaient ainsi, les gopis sentaient leurs sentiments pour Krsna se faire de plus en plus intenses; elles refaisaient l’expérience de Son sourire, de Ses mots d’amour, de Ses traits séduisants, de Son caractère et de Ses étreintes. Si forte était leur extase qu’il leur semblait voir Krsna présent en Personne et dansant devant elles. Si doux leur était le souvenir du Seigneur, qu’elles ne purent retenir leurs larmes et se mirent à pleurer sans autre considération.
Sri Balarama pouvait fort bien comprendre les sentiments d’extase des gopis et voulut donc les apaiser. Lui aussi était habile dans l’art de la parole. Ainsi, avec les marques d’un grand respect et beaucoup de tact, Il Se mit à conter aux gopis l’histoire de Krsna; et elles en furent satisfaites. Et pour que leur satisfaction soit durable, Sri Balarama demeura à Vrndavana deux mois entiers, celui de Caitra (mars-avril) et celui de Vaisakha (avril-mai). Pendant tout ce temps Il demeura parmi les gopis et passa chaque nuit avec elles dans la forêt de Vrndavana, afin de combler leurs désirs amoureux. C’est ainsi que Balarama jouit également de la danse rasa en compagnie des gopis. C’était le printemps, et la brise soufflait avec douceur sur la berge de la Yamuna, portant l’arôme de diverses fleurs, dont la kaumudi. L’éclat de la lune se répandait dans tout le ciel, et illuminait les berges de la Yamuna; c’est dans ce lieu de merveilles que Sri Balarama prit plaisir en la compagnie des gopis.
Le deva Varuna envoya dans la forêt sa fille Varuni sous forme d’un miel liquide coulant des creux des arbres. La forêt tout entière en fut embaumée et le doux arôme du miel, le parfum de Varuni, captiva Balaramaji. Il but le miel, et avec Lui les gopis. Tout en se délectant de cette boisson naturelle, le varuni, elles chantaient les gloires de Sri Balarama, qui Se sentait plein de bonheur, et comme enivré par le miel. Ses yeux roulaient plaisamment, de longues guirlandes de fleurs sauvages Le paraient: tout contribuait à faire de cette nuit une grande fête de bonheur. Un sourire merveilleux brillait sur les lèvres de Sri Balarama, et les gouttes de sueur sur Son visage étaient comme la fraîche rosée du matin.
Dans cette humeur joyeuse, Il désira jouir de la compagnie des gopis dans les eaux de la Yamuna, et enjoignit à la rivière de s’approcher d’eux. Mais la Yamuna négligea l’ordre de Balaramaji, Le tenant pour ivre. Lui, tout à fait mécontent, décida sur-le-champ de sillonner de Sa pioche la terre des rives. Sri Balarama possède deux armes, une pioche et une masse, dont Il use selon le besoin. Pour cette fois, Il voulait rapprocher de force la Yamuna, pour la punir. Il lui adressa ces mots: «Rivière déchue! Puisque tu n’as pas eu souci de Mon ordre, Je vais te donner une leçon. Tu n’as pas voulu venir de toi-même? Eh bien, Ma pioche t’y forcera! Je t’éparpillerai en centaines de ruisseaux!».
A cette menace, la Yamuna sentit en elle une grande crainte, sachant la puissance de Balarama. Elle vint en personne, tomba aux pieds pareils-au-lotus du Seigneur, et pria ainsi: «O cher Balarama, Tu es l’Etre le plus puissant, qui fait le plaisir de tous. Par malheur, j’ai oublié un instant Ta haute et glorieuse position, mais à présent, retrouvant la raison, je me rappelle que par Ta simple émanation partielle, Sesa, Tu soutiens sur Ta tête tous les systèmes planétaires; l’Univers tout entier repose sur Toi. O Dieu, ô Personne Suprême, Tu jouis pleinement des six excellences. Oublieuse de Ta toute-puissance, j’ai désobéi à Ton ordre. Quelle erreur! Car je me suis rangée parmi ceux qui T’offensent. Cependant, ô cher Seigneur, je T’en prie, sache que je suis une âme soumise à Ta Personne. Grande est l’affection que Tu portes à Tes dévots; excuse donc mon impudence et mes erreurs; puisse Ta miséricorde immotivée s’exercer en ma faveur».
S’étant soumise, la Yamuna fut pardonnée. Elle était toute proche, maintenant, et Sri Balarama souhaita jouir du plaisir de nager dans ses eaux en la compagnie des gopis, comme un éléphant s’ébat avec ses nombreuses compagnes. Le bain dura longtemps, puis, lorsque Sri Balarama eut connu pleine satisfaction, Il sortit des eaux. Alors une déesse de la fortune Lui offrit un bel habit bleu, ainsi qu’un précieux collier d’or. Grande était la séduction de Sri Balarama, après Son bain dans la Yamuna, vêtu de bleu et paré de bijoux d’or. Comme Son teint est blanc, Il ressemblait à l’éléphant blanc du roi Indra, dans les planètes édéniques. Aujourd’hui encore, la rivière Yamuna se divise en de nombreuses petites branches: elle a été écorchée par la pioche de Sri Balarama. Et ces branches de la Yamuna glorifient toujours Sa toute-puissance.
Chaque nuit, pendant deux mois, Sri Balarama et les gopis prirent ainsi plaisir ensemble à leurs Divertissements spirituels et absolus; le temps coulait pour eux si vite que toutes ces nuits n’en semblèrent qu’une. Sri Balarama présent, les gopis et les habitants de Vrndavana avaient retrouvé la même joie qu’aux jours où habitaient avec eux les deux Frères, Sri Krsna et Sri Balarama».
Ainsi s’achèvent les enseignements de Bhaktivedanta pour le soixante-quatrième chapitre du Livre de Krsna, intitulé: «Sri Balarama visite Vrndavana».
Catégories :Les divertissements de Krishna