Questions sur la Conscience de Krishna (2/2)

Deuxième Partie

Questions de  Ashley Vishwanatha  (site  bharaty)

Pourquoi certains devots sont irrités quand on leur pose des questions ?

Est ce qu’on peut atteindre le monde spirituel en ne pratiquant que le Jñāna-Yoga ?

Est-ce une offense de vouloir se réincarner ?

Est-ce que quelqu’un qui a un passé lourd de péchés peut devenir un vrai devot ?


Pourquoi certains dévots sont irrités quand on leur pose des questions ?

Personnellement, je ne suis pas irrité, au contraire j’aime que l’on me pose des questions, particulièrement quand la personne a une disposition à écouter et appliquer les réponses et à se corriger aux besoins ( pour le plaisir de Krsna).

Il faut savoir que le dévot ne répond pas aux questions, selon son opinion personnelle, – malgré qu’il ne parle pas non plus comme un livre ouvert car il a une réalisation personnelle de la conscience de Krishna -,et si parfois, en effet, il peut sembler irriter ce n’est pas pour lui-même, mais parce qu’il aimerait que la personne concernée évite, le cas échéant, de toujours remettre en question les instructions de Krishna, et s’abandonne enfin à Lui, pour son bien le plus complet.

Dans le cours d’une recherche philosophique ou théologique, la culture védique nous enseigne qu’il est essentiel que le débat aboutisse, et ainsi que l’on puisse établir le siddhanta ou la conclusion , au débat. D’ailleurs en sanskrit la philosophie est désigné sous le nom de darśhana (les 6 systèmes philosophiques fondamentaux védiques sont désignés de cette façon) , qui veut dire « perception directe », ce qui le distingue du système occidentale et de son approche purement spéculative.

Ainsi, la recherche philophique védique ne prend pas la forme, contrairement à la démarche philosophique de style occidental, d’un débat sans fin, pour le plaisir de débattre et d’argumenter, sans jamais arriver à aucune conclusion, ou pour dire les choses plus crument, d’une sorte de « masturbation mentale ». On appelle cela « la philosophie de salon », où l’on n’arrive jamais à aucune conclusion, et où l’on discute à n’en plus finir, et  perd ainsi un temps précieux. Non, le dévot est conscient que le temps est infiniment précieux et que l’on ne peut racheter même avec des milliards, le temps qui nous est imparti au cours de cette vie selon son  karma. Donc, si Krishna représente la conclusion de toute recherche philosophique et métaphysique « Vāsudeva param jñānam » (SB 1.2.28), pourquoi ne pas arriver à cette conclusion le plus vite possible?

Est-ce qu’on peut atteindre le Goloka (le monde spirituel) en ne pratiquant que le Jñāna Yoga ?

Non, c’est impossible. D’abord rappelons ce qu’est le Jñāna-Yoga pour ceux qui l’ignoreraient. Jñāna (prononcez guiâna), en sanskrit, signifie connaissance, et le jñāna-yoga c’est le fait d’atteindre à l’Absolu (yoga) à travers la culture de la connaissance transcendantale. Malheureusement, ce genre d’approche de l’Absolu conduit à l’aspect impersonnel de la Vérité Absolue qui n’est que partiel. Ainsi, à travers l’étude de texte védiques tels que les Upanisads et le Vedanta-sutra (et de nombreux autres), les jñānis essaient d’atteindre à la réalisation spirituelle à travers la spéculation mentale. Mais ils ne peuvent atteindre qu’à la réalisation du Brahman impersonnel ainsi, et ce n’est jamais de cette façon empirique que l’on peut comprendre la Vérité Absolue, dans son aspect ultime, soit l’aspect personnel de Dieu, Sri Bhagavan la Personne Suprême (voir les trois aspects de la Vérité Absolu). C’est pourquoi dans la Bhagavad-gita Krishna dit  » A travers le service de dévotion, et seulement ainsi, on peut Me connaître tel que je suis. »   BG (18.55) et dans la teneur et portée Srila Prabhupada dit : « abhaktas ou par la spéculation intellectuelle. Celui qui désire connaître et comprendre le Seigneur Suprême doit adopter le service de dévotion pur et l’accomplir sous la conduite d’un pur bhakta. Sinon, la vérité sur la Personne Suprême demeure toujours cachée. » Donc si l’on ne peut même pas le comprendre et approcher Dieu, le Seigneur Suprême à travers la spéculation philosophique, que dire de la possibilité de se rendre sur la même planète que Lui; ce qu’explique la suite du verset . Cette prérogative est exclusivement réservée aux bhaktas: « Et l’être qui, par une telle dévotion, devient pleinement conscient de Ma Personne, entre alors en Mon Royaume absolu. »BG (18.55) .

Est-ce une offense de vouloir se réincarner ?

Oui, c’est une offense envers Dieu, le Seigneur Suprême, de vouloir se réincarner. Le fait de s’être incarné dans un corps matériel doté de sens matériels, marque le symptôme de notre rebellion vis-à-vis de Dieu, le Seigneur Suprême. Tout comme le fait de posséder un uniforme de bagnard, un uniforme de prisonnier, indique que la personne à commis des actes criminels vis-à-vis de l’Etat , de la même façon ce corps matériel est notre habit de rebellion vis-à-vis de Dieu.

Pourquoi? Parce que ce corps matériel est la manifestation de notre désir d’indépendance vis-à-vis de Dieu. Nous avons ainsi voulu tourner le dos au service de dévotion offert à Dieu , et choisi au contraire de nous servir plutôt nous-même, c’est-à-dire de servir plutôt les sens matériels plutôt que les sens de Krishna, Govinda (la Source de plaisir des sens). Non seulement, le fait que nous soyons incarnés montre notre rebellion, mais aussi notre manque d’intelligence réelle, car en agissant de la sorte nous avons en même temps agit contre notre propre intérêt ,et sommes devenus obligés de lutter trés dur, comme l »explique Krishna dans la Bhagavad-gita:

mamaivāḿśo jīva-loke
jīva-bhūtaḥ sanātanah

                                  manaḥ-ṣaṣṭhānīndriyāṇi
                                    prakṛti-sthāni karṣati

Les êtres, dans le monde des conditions, sont des fragments éternels de Ma personne. Mais parce qu’ils sont conditionnés, ils luttent avec acharnement contre les six sens, et parmi eux, le mental.
Bhagavad-gita (15.7)

Ainsi, dès que l’on revêt un corps matériel, ce verset l’explique, sa teneur et portée le développe, et c’est notre expérience à tous,  nous devons immédiatement lutter contre les six sens et le mental.

A l’origine, en tant qu’âmes spirituelles pures, nous possédons un corps spirituel. Ce corps spirituel est alors identique à notre moi réel (autrement dit il n’y a aucune distinction entre moi et mon corps spirituel) tandis que le corps matériel actuel est tout à fait distinct et différent de notre réelle identité. Quand on parle de corps matériel, on parle en fait de deux corps matériels: le corps matériel grossier et le corps matériel subtil. Le premier est composé des éléments matériels grossiers (terre, eau, feu, air et éther) et le deuxième des éléments matériels subtils (mental, intelligence et faux ego).

C’est ce deuxième qui, en fait, nous transporte d’une enveloppe corporelle à une autre, d’un corps à un autre , allant sans cesse d’une espèce à l’autre, parmi les 8 640 000 espèces de corps matériels; espèces végétales, animales, espèces d’insectes, d’oiseaux, humaines.

A l’origine, donc notre identité est d’être une parcelle de Dieu ou Krishna, éternelle, remplie de connaissance et de félicité, libre de la souillure et du joug de l’énergie matérielle. Mais pour avoir rejeté, le service du Seigneur, nous avons dû choir immédiatement dans la prison de ce monde matériel et accepter un corps matériel. Et pour reprendre l’analogie précédente, nous avons dû revêtir notre costume de prisonnier, notre costume de chair.

Il faut bien comprendre cependant que bien que le fait de posséder un corps matériel pose certainement quelques inconvénients et certains obstacles dans la poursuite de la vie spirituelle et dévotionnelle, nous pouvons malgré tout, comme Srila Prabhupada aimait souvent à le dire, « faire bon usage d’une mauvaise affaire ».

Et puisque tout provient de Dieu, tout tire son origine de Lui, y compris certainement ce corps matériel, on peut dire donc, au sens large, que « tout est spirituel » et rien n’est matériel. C’est seulement notre vision limitée et pervertie des choses, et l’usage que l’on en fait (au service de nos sens plutot qu’au service des sens de Krishna), qui font qu’elles sont matérielles ou spirituelles. Et ainsi en va-t’il de notre corps. Celui-ci bien que composé des éléments matériels sités précédemment peut être entièrement spiritualisé et nos sens purifés lorsqu’engagé dans le service de dévotion.

Ainsi pour résumer la question « Est-ce une offense de se réincarner? ». Oui, mais on peut se racheter, se rectifier, en utilisant notre corps matériel et ses sens au service de Krishna sous la direction d’un maître spirituel qualifié, et ainsi à la fin de notre vie nous échapperons à une nouvelle réincarnation, et retournerons plutôt à Krishna, dans le monde spirituel. 

Est-ce que quelqu’un qui a un passé lourd de péchés peut devenir un vrai devot ? 

Oui, et en fait, beaucoup d’entre nous rentrons dans cette catégorie (d’un passé lourd de péchés) . Selon la norme védique, nul ne peut se prétendre réellement civilisé, s’il n’observe pas les quatres principes régulateurs propre à l’être humain: le fait de ne pas consommer de la chair animale, de ne pas s’adonner à la vie sexuelle illicite, de ne pas prendre d’intoxicants ( comprenant toute consommation d’alcool, thé, café), et enfin de ne pas pratiquer les jeux de hasard. Si quelqu’un viole sciemment ces principes il est immédiatement considéré, selon la norme védique, déchu, hors-caste, ou selon le terme sanskrit; un « mleccha » (un intouchable).

Selon les Ecritures védiques nous naissons tous au départ sudras:  » Janmanā jāyate śudraḥ » , mais la société védique est organisée de façon telle, qu’en observant les différentes samskaras ou cérémonies de purification propre à l’être humain, peu à peu, nous nous élevons au rang de dvija ou deux-fois né . Cela concerne les vaisyas, ksatriyas, et les brahmanas.

Mais voilà, ce qui change tout, est le fait, qu’à présent, nous nous trouvons en plein âge de Kali, l’âge pendant lequel l’homme perd graduellement tout intérêt à la réalisation spirituelle, et par là même, à l’observation des principes de purification propres à nous aider à progresser dans cette voie. Et, ainsi, l’homme dans cet âge de déchéance, est plutôt enclin à s’abandonner sans restriction, au plaisir des sens. Dans le kali-yuga, les Ecritures avaient prédites, que tout le monde se comporterait comme un sudra: « kalau śudra-sambhavaḥ » ou pire encore, comme un animal.

Cette situation, d’abandon sans restriction aux plaisirs des sens, est vraiment trés risquée car, l’homme court ainsi le risque, d’abord, de subir de sévères punitions sur les planètes infernales après sa mort (voir les candidats pour l’enfer) , mais aussi, après cela, de devoir prendre naissance dans un corps animal, ou plus bas encore. Ce qui constitue, selon la Bhagavad-gita, le plus grand danger qu’y soit (mahato bhayāt) pour un être humain (BG 2.40) . Il lui faudra aussi, une fois qu’il aura régresser dans une espèce inférieure, remonter toute l’échelle de l’évolution, à travers différentes espèces, avant de retrouver finalement un corps humain.

C’est donc un comportement parfaitement stupide et totalement irrationnel, car pour quelques années de soi-disant plaisir des sens, on court le trés grand risque, ensuite, de devoir intégrer un corps animal ou celui d’un insecte, d’un ‘arbre, etc…

Il est donc urgent de se réveiller si l’on se trouve dans le cas de figure précédent, avant qu’il ne soit trop tard. Et, nous avons une grande chance, dans cet âge: pouvoir bénéficier du Mouvement du Seigneur Caitanya, le Mouvement du Sankirtana, ou le chant congrégationnel des Saints Noms de Dieu: Hare Krishna, Hare Krishna, Krishna, Krishna, Hare Hare / Hare Rama, Hare Rama, Rama Rama, Hare Hare.

Ainsi dans le Bṛhad-nāradīya Purāṇa, il est spécifié que pour cet âge de Kali, l’âge dans lequel tout le monde pratiquement, est déchu, il n’y a pas d’autres remèdes que de chanter les Sains Noms de Dieu:

harer nāma harer nāma
harer nāmaiva kevalam
kalau nāsty eva nāsty eva
nāsty eva gatir anyath
ā

 » Chante le Saint Nom du Seigneur, car en cet âge de querelle et d’hypocrisie, il n’existe pas d’autre moyen, pas d’autre moyen, pas d’autre moyen pour atteindre la libération. « 

Un autre verset du Srimad Bhagavatam met l’accent sur le fait que dans cet âge, qui est un véritable océan de fautes, il existe, cependant, pour atteindre la libération, une bénédiction suprême et unique, c’est le chant des Saints Noms de Dieu :

                    kaler doṣa-nidhe rājann
                   asti hy eko mahān guṇaḥ
                      kīrtanād eva kṛṣṇasya
                  mukta-sańgaḥ paraḿ vrajet

                                             SB (12.3.51)

Donc pour conclure votre question, « Est-ce que quelqu’un qui a un passé lourd de péchés peut devenir un vrai dévot? ». Oui, certainement. Même la personne la plus coupable et pêcheresse a la possibilité de devenir un vrai dévot (un pur dévot). Dans le Mouvement pour la conscience de Krishna que Srila Prabhupada a initié, pratiquement tous les dévots, avant de joindre, à des niveaux différents, avaient brisés allègrement les principes régulateurs, et même, ignoraient jusqu’à leur existence. Beaucoup, parmi nous, étions des coureurs de filles, des buveurs d’alcool, fumeurs et pour certains d’autres intoxicants plus forts encore, des mangeurs de viande et enfin, s’adonnaient aux jeux de hasard. Mais grâce à Srila Prabhupada, à la compagnie des dévots et à la pratique de la conscience de Krishna (l’écoute et le chant des Saints Noms, la lecture de la Bhagavad-gita, le service de Krishna, le prasadam, etc..) nous sommes devenus purifiés de nos activités coupables, de notre karma.

Il est dit, dans les Ecritures védiques, que le Saint Nom de Krishna est si puissant que le fait de Le chanter annule les effets d’une quantité d’actions pécheresses plus importante que nous ne saurions jamais en mesure de commettre. Toutefois pour devenir un vrai dévot (comme vous dites, et l’on pourrait dire un pur dévot) , il existe des pièges à éviter sur la voie de la perfection spirituelle de la conscience de Krishna. Par exemple, le fait de chanter Hare Krishna, tout en continuant de commettre des activités coupables en est un.(*)

Il faut donc faire bien attention d’être sincère quand on se tourne vers Krishna pour s’abandonner à Lui. Il faut, à la fois, s’engager à éviter les principes néfastes au service de dévotion . Et il faut, en même temps, s’engager à suivre les principes favorables au service de dévotion

On pourrait continuer encore plus avant sur ce thème (de réformer sa vie pécheresse et de devenir à l’opposé, un pur dévot), mais pour être concis, il ne faut pas omettre de souligner que la meilleur façon de progresser dans le service de dévotion est de pouvoir obtenir la compagnie intime d’un dévot qui est lui-même avancé sur cette voie. Il faut pouvoir écouter les discours qu’il donne sur les Ecritures védiques, principalement la Bhagavad-gita et le Srimad-Bhagavatam, le servir, le satisfaire et s’en remettre, avec soumission et dévotion, à Ses instructions, faites pour nous guider sur la voie de la perfection dans la conscience de Krishna.

J’ai encore des questions si cela ne vous derange pas ?

D’accord, rendez-vous dans trois semaines si vous le voulez bien… 

* 2 Néammoins, le fait de continuer à chanter et à pratiquer le service de dévotion fait que l’on se purifiera graduellement de toute impureté. Il ne faut donc jamais se décourager ou décider de s’arrêter de chanter Hare Krishna sous prétexte que l’on est pas capable de suivre immédiatement et trés strictement les 4 principes régulateurs. Car, en chantant constamment, ou le plus souvent possible, graduellement, on acquèrera la force nécessaire à l’observation rigoureuse des quatre principes régulateurs.



Catégories :La voie et la pratique du bhakti-yoga

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