La crise financière
et la nature démoniaque
Avidité, passion, ignorance, concupiscence…
Avec l’avènement d’une crise financière mondiale sans précédent, la concupiscence et l’avidité de nombreuses personnes ont été exposées au grand jour. A la suite de grandes pertes financières, il est apparu aux yeux du monde entier que de nombreuses banques, réputées au demeurant fiables et bien portantes, s’étaient en fait, pendant des années durant, comportées comme de vulgaires joueurs de casino pariant avec l’argent des autres. Ainsi, l’avidité et la perfidie est telle à notre époque que, dans l’espoir de réaliser d’énormes profits, les banquiers et leurs acolytes, sensées pourvoir au financement de l’économie, s’adonnent au lieu de cela , à une spéculation financière effrénée sur le dos de celle-ci. Insatiables et arrogants, ces personnages sans scrupules n’ont pas hésité , comme on le voit actuellement, à mettre en péril l’économie entière d’un pays (et au-delà du monde entier).
On ne peut limiter cette esprit d’avidité à la seule sphère bancaire. Srila Prabhupada, le maître spirituel-fondateur du Mouvement International pour la conscience de Krishna, a maintes fois, pour expliquer les causes profondes du mal-être social et économique actuel, souligné la trop grande avidité et la concupiscence de l’homme d’aujourd’hui:
« Le monde entier est sous l’emprise de la convoitise et de l’avidité; le stade de l’ignorance et de la passion. Ceux qui subissent l’influence de ces puissances inférieures de la nature – l’ignorance et passion -, se retrouvent conditionnés par deux choses: kama, la convoitise (« Je ne suis pas satisfait »‘), et lobha, l’avidité (« Je veux plus, je veux plus, je veux plus. ») . Ils demeurent insatisfaits en dépit de tout ce qu’ils ont . Le monde entier est ainsi….Parfois ils pensent : « Si j’obtiens un salaire de deux milles euros, je serai satisfait ». Mais dès qu’ils obtiennent deux milles euros, ils veulent trois milles euros. Partout, à travers le monde, c’est la même chose; même après que leurs salaires ont augmenté, les gens repartent en grêve quelques temps après , » Plus d’argent, plus d’argent, plus d’argent… » Et aussitôt qu’ils obtiennent plus d’argent, ils l’utilisent dans le but d’assouvir leur convoitise et leur avidité. Ils ne savent pas comment utiliser leur argent….Les millionnaires quant à eux sont si concupiscents… Je l’ai constaté alors que je me trouvais à Paris. Ils se rendent dans des clubs de nuit. Même des hommes âgés s’y rendent. Qu’ont-ils à y faire? (alors qu’ils sont âgés). Ils sont tellement concupiscents ! Pour entrer dans ces clubs ils sont prêts à payer 50 euros , ensuite, ils consomment de l’alcool en compagnie de jeunes femmes. Tel est leur plaisir. ..D’un côté, il y a l’avidité (lobha) et ils sont insatisfaits, même s’ils possèdent des millions d’euros, ‘ Encore, encore, encore, je veux encore ! » et d’un autre côté, il y a (kama) la concupiscence (et ils recherchent, encore et encore , la compagnie des jeunes femmes, ). » Extrait de la classe sur le Srimad Bhagavatam (1.2.19) du 22 août 1972 à Los Angeles.
Une « nature démoniaque » à l’origine de la débacle
Dans la Bhagavad-gita les thèmes de l’avidité et de la concupiscence, les causes premières de la crise sociale et économique actuelle, sont également abordés. L’homme influencé par ces mauvaises qualités développe ce que la Bhagavad-gita nomme « sampadam asurim » : « une nature démoniaque ». La Bhagavad-gita explique (au 16ème chapitre) que les êtres en ce monde matériel peuvent être influencés par deux sortes de natures: la nature divine et la nature démoniaque.
L’état d’esprit démoniaque est décrit dans la Bhagavad-gita ainsi:
« Les êtres démoniaques, qui se réfugient dans la vanité de soi, l’orgueil et l’insatiable concupiscence, deviennent la proie de l’illusion. Fascinés par l’éphémère, ils consacrent leur vie à des actes malsains. »
(BG 16.10 )
Nul doute que les hommes qui soutiennent un système où la spéculation financière est un moteur économique essentiel vivent dans une bulle d’illusion (d’ailleurs, ne parle-t’on pas de bulle spéculative ? ) . Une bulle qui peut être crevée à tout moment par des krachs dévastateurs (1) .
Srila Prabhupada dans la teneur et portée de ce verset écrit:
« L’état d’esprit démoniaque se trouve décrit dans ce verset. La concupiscence des hommes qui en sont animés ne connaît aucun apaisement. Au contraire, ils continueront de multiplier sans fin leurs désirs insatiables de jouissance matérielle…Deux choses, les fascinent toujours plus: le plaisir sexuel et l’accumulation des richesses matérielles. »
Décrivant les caractéristiques de la nature démoniaque, la Bhagavad-gita poursuit:
« Jouir des sens jusqu’au dernier moment, tel est, croient-ils, l’impératif majeur pour l’homme. Aussi leur angoisse ne connaît-elle pas de fin. Enchaînés par des centaines, par des milliers de désirs, par la concupiscence et la colère, ils entassent des richesses par voies illicites, pour satisfaire l’appétit de leurs sens. » (BG 16.11/12)
« …, ils entassent des richessses par voies illicites,…. » Ces mots de la Bhagavad-gita énoncés par le Seigneur Krishna il y a 5 000 ans, sont prémonitoires. Ils décrivent bien l’état des choses actuelles et l’origine des difficultés économiques et sociales que connaît le monde en ce moment.
Un mode économique avide voué à l’échec
Dans la teneur et portée de ce verset, on peut lire:
« Le plaisir des sens représente, pour les êtres démoniaques, le but ultime de la vie, auquel ils s’accrochent jusqu’à l’instant de la mort. Ils ne croient pas en la vie après la mort, ni que l’être doive revêtir différentes sortes de corps, déterminés par son karma, ses actes en ce monde. Leurs projets pour l’avenir, qu’un après l’autre sans se lasser ils élaborent, n’aboutissent jamais. »
Reprenons cette dernière affirmation : « Leurs projets pour l’avenir, qu’un après l’autre sans se lasser ils élaborent, n’aboutissent jamais ». A la lumière des évènements difficiles que nous connaissons actuellement cette phrase revêt une résonance particulière . Ce que nous voyons se produire présentement est la faillite d’un système économique basé sur la spéculation financière pure (2) . Un tel système est fondé sur une grande avidité pour la richesse. Soulignant ce point dans sa chronique « Finance et spéculation: Une économie parasitaire », David Torrès, un chroniqueur politique, souligne :
» L’argent qui circule sur ces marchés n’est utilisé pratiquement qu’à des fins de spéculation, c’est-à-dire à l’achat de produits financiers, (comme les actions, les obligations…) dans l’espoir de réaliser une plus value au moment de leur revente. En plus de l’augmentation de la spéculation, ce sont des produits de plus en plus risqués qui s’échangent, comme les « sub-primes ». …
Le secteur financier par le moyen des traders (opérateurs de marché) a mis au point un mode d’enrichissement spéculatif parasitaire. Parasitaire signifie » qui vit et prospère au dépend des autres. » Un mode économique parasitaire signifie donc que quelques uns s’enrichissent considérablement au dépend du plus grand nombre (3). Dans « Finance et spéculation, … », Mr Torrès le souligne: » Cette crise implique les plus grandes banques du monde, qui utilisent notamment l’épargne des ménages pour spéculer. »
Des oeuvres nuisibles qui détruisent le monde
Mais il y a plus grave encore. Après avoir, à partir de l’exploitation de leur épargne même, mis l’activité professionnelle de leurs semblables en péril – autrement dit engendré chômage et pauvreté -, les protagonistes d’une spéculation effrenée, à présent s’en prennent à leur vie même.
La Bhagavad-gita décrit fort bien les caractéristiques des êtres démoniaques sans scrupule. Ils sont prêts pour assouvir leur concupiscence sans borne à » se livrer à des oeuvres nuisibles, qui visent à détruire le monde »
« Ce qu’il faut ou ne faut pas faire, les êtres démoniaques l’ignorent. En eux, ni pureté, ni juste conduite, ni véracité. » (BG 16.7)
« Ils prétendent que ce monde est irréel et sans fondement, qu’aucun Dieu ne le dirige; qu’il résulte du désir sexuel et n’a d’autre cause que la concupiscence. » (BG 16.8 )
» Partant de telles conclusions, les démoniaques, égarés, dénués d’intelligence, se livrent à des oeuvres nuisibles, infâmes, qui visent à détruire le monde. » (BG 16.9 )
Dans le contexte de la crise actuelle, quels sont exactement ces actes infâmes qui visent à détruire le monde dont parle la Bhagavad-gita ? Mr Torrès nous le révèle:
« Enfin, les mesures prises par les banques centrales (4) ont provoqué une augmentation de la spéculation : Après la chute des cours sur les marchés financiers, une partie importante du capital, enrichie par les milliards émis par les banques centrales, s’est déplacé vers « les valeurs refuge », qui ont peu de chance de chuter en cas de crise, produits agricole et matières premières. En rachetant sur les marchés des matières premières, puis en stockant, les cours sur les marchés ont augmenté. Autrement dit, d’une spéculation financière, le capital passe à une spéculation sur des produits vitaux, rachetant les stocks à bas prix, et en faisant monter les cours, puis en revendant avec profit.
Il est vrai que l’augmentation rapide de la demande des marchés émergeant comme en Chine fait augmenter les prix, qu’il y a eu de relatives mauvaises récoltes dans certains pays, ce qui limite l’offre et exerce également une pression sur les prix, mais l’explosion actuelle des prix des matières premières et des produits agricoles est largement due à l’action des spéculateurs.
Tout cet argent échangé sur les marchés financiers est « parasité », il n’est pas investit et ne contribue donc pas au développement. Pourtant, de telles sommes pourraient sortir une grande partie de l’humanité de la misère dans laquelle on la maintient.
Bien au contraire, ce capital financier exerce une pression de plus en plus forte sur les populations. Il met les travailleurs du monde entier en concurrence. Il est responsable aujourd’hui de la montée des prix de première nécessité, plongeant une partie importante de la population mondiale dans une honteuse crise alimentaire : Et à ce petit jeu là, ce sont les populations les plus pauvres qui se retrouvent privées de moyens de subsistance… »
(1) Crises mexicaine (1995), asiatique (1997), russe (1998), crise de la nouvelle économie (2000), argentine (2001), crise des subprimes (2007) se sont succédé, une bulle chassant l’autre
(Extrait de Mort à crédit de David Torrès)
(2) D’après la Banque des Règlements Internationaux (la BRI), la taille du marché de change (ou s’échangent les monnaies) a été multipliée par 3 de 1998 à 2001. En 2001, 1500 milliards de dollars, soit le PIB annuel de la France, ont été échangé chaque jour sur le marché des changes. Avec plus de 190000 milliards de dollars en 2006, la finance représente 400% du PIB mondial.
(3) 100 000 personnes seulement disposent d’avoirs financiers équivalents au quart du PIB mondial, soit près de 15 000 milliards de dollars (10 601 milliards d’euros).
(Extrait de Mort à crédit de David Torrès)
(4) Les autorités monétaires face à la crise de liquidité ont réagi en injectant à travers les banques centrales , la FED (banque centrale américaine), la BCE (banque centrale européenne) et la banque centrale Japonaise 2000 milliards de dollars dans les marchés financier.
( Extrait de Finance et spéculation: une économie parasitaire)
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