Søren Kierkegaard à la lumière des Vedas (1/2)

SPIRITUALISME DIALECTIQUE
Un point de vue védique sur la philosophie occidentale
________

 Kierkegaard
Søren Kierkegaard
(1813-1855)

Dans l’entretien qui suit, Hayagriva das (Prof. Howard Wheeler) et Syamasundar das (Sam Speerstra) présentent la philosophie de Søren Kierkegaard à Sa Divine Grâce A.C. Bhaktivedanta Swami Prabhupada ( Fondateur-Acharya du Mouvement pour la Conscience de Krishna ) qui la compare à la pensée védique.
(Pour la définition des termes védiques utilisés dans ce texte  vous pouvez consulter le Glossaire)

HAYAGRIVA: Kierkegaard, philosophe danois et chrétien, est souvent appelé le père de l’exitentialisme. Il croit que si les vérités religieuses ne sont pas innées en l’homme, elles doivent être transmises par un précepteur. Puisque l’homme serait traumatisé par Dieu s’Il venait tel qu’Il est pour enseigner, Celui-ci Se manifeste plutôt sous la forme humaine de Son serviteur, ou pour le chrétien, en la personne de Jésus-Christ.

Accepter un gourou est une nécessité

SRILA PRABHUPADA: Généralement, du fait que les hommes évoluent au niveau animal, quelque système d’éducation est requis. Lorsque sa conscience évolue, il peut être éduqué dans la compréhension de Dieu grâce à l’enseignement d’autorités en la matière. Tel est le système védique. Dans la forme humaine, l’être se montre parfois très avide de savoir et désire comprendre Dieu. C’est ce qu’on nomme brahma-jijñâsa : prendre intérêt à l’Absolu. Cela n’est possible que dans la forme humaine. Si nous désirons connaître Dieu, nous devons approcher un gourou; sinon, nous ne saurions comprendre la nature de Dieu ou de la relation qui nous unit à Lui.

Accepter un gourou n’est pas une mode, mais une nécessité. Le gourou doit être parfaitement versé dans l’océan de savoir spirituel, ou de sagesse védique. Le langage ou les vibrations sonores védiques ne sont pas des sonorités ordinaires, matérielles. Elles sont purement spirituelles. Citons, à titre d’exemple, le mahâ-mantra Hare Krishna. Une fois parfaitement versée dans l’océan des sonorités spirituelles, une personne perdra tout intérêt pour l’existence matérialiste. Elle ne fabriquera pas non plus de l’or, pas plus qu’elle ne jouera avec les mots pour attirer des insensés et s’enrichir à leurs dépens. Le gourou est par définition celui qui ne porte plus d’intérêt aux choses matérielles. Ayant cherché refuge auprès du Seigneur Suprême, ses désirs matériels ont cessé d’exister. Nous devons approcher ce gourou authentique, nous abandonner à lui, le servir, puis s’enquérir auprès de lui de Dieu et de la relation qui nous unit au Seigneur.

Krishna sous les traits de Chaitanya Mahaprabhu

HAYAGRIVA: Kierkegaard a-t-il raison de maintenir que l’homme serait traumatisé si Dieu venait tel qu’Il est l’instruire. Krishna n’est-Il pas apparu tel qu’Il est pour enseigner la Bhagavad-Gîtâ ?

SRILA PRABHUPADA: Oui, mais les gens se méprirent sur Son identité, croyant voir en Lui un homme ordinaire. Puisqu’ils ne purent s’abandonner à Lui, Il revint plus tard sous les traits d’un dévot en la personne de Chaitanya Mahaprabhu pour enseigner aux hommes comment approcher Dieu. Ainsi faut-il comprendre Sri Chaitanya. Saisissant la nature de Ses activités, Sarvabhauma Bhattâchârya composa une centaine de versets pour Lui témoigner sa réconnaissance. En voici deux :

vairagya-vidya-nija-bhakti-yoga
siksartham ekah purusah puranah
sri-krsna-caitanya-sariradhari
krpambudhir yas tam aham prapadye
kalan nastam bhakti-yogam nijam yah
praduskartum krsna-caitanya-nama
avirbhutas tasya padaravinde
gadham gadham liyatam citta-bhrngah

« Je prends refuge en Dieu, la Personne Suprême, Sri Krishna, qui est descendu en la personne de Chaitanya Mahaprabhou pour nous enseigner la connaissance véritable, Son service de dévotion et le détachement vis-à-vis de tout ce qui ne favorise pas la conscience de Krishna. Il est descendu en ce monde car Il est un océan de miséricorde transcendantale. Je m’abandonne à Ses pieds pareils-au-lotus. Que ma conscience, telle une abeille, prenne refuge aux pieds pareils-au-lotus de Dieu, la Personne Suprême, qui vient d’apparaître en tant que Sri Krishna Chaitanya Mahaprabhu pour enseigner la science millénaire du service de dévotion offert à Sa propre personne. Cette science s’était presque perdue au cours du temps. » (Chaitanya-charitamrita, Madhya 6:254-255)

Sarvabhauma comprit donc que Chaitanya Mahaprabhou est ce même Krishna venu enseigner le bhakti-yoga et le renoncement. Sri Chaitanya enseigna la même philosophie que Krishna : celle de la Bhagavad-Gîtâ. Toutefois, au lieu d’apparaître sous les traits de Krishna, Il est venu comme Son dévot. Rupa Goswami considère pour sa part Chaitanya comme l’avatar le plus magnanime, puisqu’en plus de donner Krishna, Il offre aussi le pur amour pour Dieu : namo mahâ-vadânyâya krsna-prema-pradâya te (C.C. Madhya 19:53). Avant de Se donner à Son dévot, Krishna exige que celui-ci s’abandonne entièrement à Lui; Chaitanya, toutefois, accorde le pur amour pour Krishna, sans rien exiger en retour. Étant tous Ses fils, Krishna, le Seigneur Suprême, éprouve de l’affection pour nous. Nous voyant croupir dans l’Univers matériel, Il vient Lui-même ou tel un dévot pour nous transmettre Son enseignement, désirant toujours éclairer l’être humain et lui indiquer la voie du retour en sa demeure première, le royaume de Dieu.

La pression d’un Dieu personnel

HAYAGRIVA: Quant à la personnalité de Dieu, Kierkegaard écrit : « Dieu est certes personnel, mais qu’Il veuille l’être avec quelqu’un dépend de Son bon plaisir. C’est la grâce de Dieu s’Il désire établir des rapports personnels avec vous. Si vous refusez Sa grâce, Il vous punira en Se comportant objectivement [de façon impersonnelle] envers vous. »

SRILA PRABHUPADA: Voilà un excellent point. Comme l’enseigne la Bhagavad-Gîtâ (12:5) :

kleso ’dhikataras tesâm avyaktâsakta-cetasâm
avyaktâ hi gatir duhkham dehavadbhir avâpyate

« Pour ceux dont le mental s’attache au non-manifesté, à l’aspect impersonnel de l’Absolu, il est fort pénible de progresser, car cette voie s’avère toujours ardue pour l’être incarné. »

HAYAGRIVA: Parce que l’homme moyen ne souhaite pas établir une relation personnelle avec Dieu, « en ce sens on peut dire que le monde n’a pas de Dieu personnel, malgré toutes les preuves du contraire… Il n’existe plus de ces êtres humains qui pourraient supporter la pression et le poids d’avoir un Dieu personnel. »

SRILA PRABHUPADA: En effet. Un Dieu personne exige beaucoup. À titre d’exemple, Krishna demande dans la Bhagavad-Gîtâ (9:34) :

man-manâ bhava mad-bhakto mad-yâjî mâm namaskuru
mâm evaisyasi yuktvaivam âtmânam mat-parâyanah

« Emplis toujours de Moi tes pensées, offre-Moi ton hommage et voue-Moi ton adoration. Entièrement absorbé en Moi, certes tu viendras à Moi. » Voilà ce qu’exige Dieu. En obéissant, on obtiendrait la perfection. Tyaktvâ deham punar janma naiti mâm eti (Gîtâ 4:9) : il est clairement dit ici qu’en quittant son corps matériel, le dévot du Seigneur n’en revêt pas un nouveau; il retourne plutôt auprès de Dieu dans son corps spirituel, originel.

Trois stades fondamentaux de l’existence:

1) le stade esthétique

SYAMASUNDAR: Kierkegaard observe trois stades de l’existence fondamentaux : le stade esthétique, le stade éthique et le stade religieux. Le stade esthétique est celui de l’hédoniste en quête de plaisir ou d’amour romantique, ou de l’intellectuel friand de spéculation philosophique. Kierkegaard dit que l’un et l’autre ne se sont pas encore engagés puisqu’ils ne visent aucun but spécifique.

SRILA PRABHUPADA: Comment le philosophe ne viserait-il aucun but ultime ?

SYAMASUNDAR: À ce stade, il demeure un adepte de la spéculation intellectuelle. Connaissant bientôt l’ennui, sa vie devient vide.

SRILA PRABHUPADA: C’est le fruit du nihilisme et de l’impersonnalisme. Leurs adeptes ne sont pas forcément en proie au désespoir, mais ils sont souvent dégoûtés de leur existence actuelle puisqu’ils n’en connaissent pas le but. Sans but, on sera déçu avant de sombrer ensuite dans le désespoir.

SYAMASUNDAR: Kierkegaard voit les êtres humains s’adonner à la jouissance comme à la spéculation intellectuelle afin de dissiuler leur désespoir fondamental.

SRILA PRBHUPADA: Dans l’Univers matériel, lorsqu’une personne échoue en affaires ou qu’elle vit un traumatisme, elle cherche l’oubli dans l’intoxication.

SYAMASUNDAR: Kierkegaard avance que ce désespoir peut servir de tremplin vers la réalisation spirituelle. Réalisant que l’existence esthétique aboutit au désespoir, on passe au stade suivant.

SRILA PRABHUPADA: Nous sommes d’accord sur ce point. Selon le Védânta-sûtra, on commence à s’enquérir de la réalisation du soi après avoir travaillé dur sans atteindre pour autant le but de l’existence. On se demande alors : « Quel est le but de la vie ? » On appelle brahma-jijñâsâ le fait de s’enquérir de l’ultime vérité dans la vie. Le fait de s’enquérir ainsi est naturel et nécessaire au progrès ultérieur.

SYAMASUNDAR: Afin d’accéder à la réalisation spirituelle, nous devons faire certains choix. Pour Kierkegaard, la vie est une question de décision. Réalisant cela, nous passons au stade éthique où l’accent est mis sur l’action.

SRILA PRABHUPADA: Il s’agit d’abord de comprendre comment l’action, ou l’activité, se produit. Quelle en est l’origine ? La science moderne se soucie de décrire ou d’être témoin des activités de la vie, et les savants prétendent que la vie se développe automatiquement de par les interactions dans la Nature. Or, la Bhagavad-Gîtâ nous fait comprendre que Dieu Se trouve derrière toutes les activités matérielles. La Nature matérielle agit sous Sa direction. Le Védânta-soûtra explique que la Vérité Absolue est la source dont tout émane et dont la nature est décrite dans le Srîmad-Bhâgavatam. Il faut avant tout comprendre que la conscience incarne l’unique origine et que la vie ne naît pas de pierres ou d’ossements. Après avoir compris que la Création ne s’opère pas automatiquement, il faut admettre l’existence du Créateur.

2) Le stade éthique

SYAMASUNDAR: Parvenu au stade éthique, l’homme peut accomplir des actes de piété ou des œuvres humanitaires. Kierkegaard y voit un pas dans la bonne direction : l’authentique individualité. En prenant une décision éthique judicieuse, nous pouvons accéder à la prise de conscience de soi et au stade religieux.

SRILA PRABHUPADA: Mais qu’en est-il de l’ultime décision ? Pourquoi devient-on moral ? Seulement pour nourrir les pauvres et faire preuve d’humanitarisme ?

SYAMASUNDAR: Peu importe notre choix aux yeux de Kierkegaard, l’important c’est de choisir. Car nous découvrons ainsi notre propre intégrité.

SRILA PRABHUADA: Mais il n’est pas clair ici comment une personne prend des décisions judicieuses. L’un choisira de tuer, l’autre d’aider autrui. Une personne peut faire la charité et dans un même temps, encourager l’abattage animal. De quelle éthique s’agit-il ici ? D’une part, Vivekananda recommandait qu’on nourrisse les pauvres; mais d’autre part, il suggérait qu’on leur serve le prasâdam de la déesse Kâlî : de la viande de taureaux. Quelle sorte d’éthique est-ce là ? Que vaut l’éthique fondée sur un savoir imparfait ?

SYAMASUNDAR: Kierkegaard dirait qu’en s’intériorisant, on prendrait des décisions judicieuses. Ce qui entraîne la connaissance de soi et l’engagement personnel.

SRILA PRABHUPADA: Mais en quoi consiste cette intériorisation ? On pourrait penser : « Je protégerai mon frère en tuant l’autre. » De quelle éthique est-il question ici ? Il nous faut quelque norme à partir de laquelle on pourra prendre une décision éclairée.

SYAMASUNDAR: Celle de Kierkegaard serait : « Choisis-toi toi-même. »

SRILA PRABHUPADA: Mais comment faire un choix sans se connaître ? Et comment se connaître à moins d’approcher quelqu’un qui connaît les choses telles qu’elles sont ? La majorité des gens croient être le corps. Quel genre de connaissance de soi est-ce là ? Qui s’identifie au corps ne vaut pas mieux qu’un âne. Que dire alors de sa philosophie ?

yasyâtma-buddhih kunape tridhâtuke sva-dhîh kalatrâdisu bhauma ijya-dhîh
yat-tîrtha-buddhih salile na karhicij janesv abhijñesu sa eva go-kharah

« L’être humain qui identifie au moi son corps constitué de trois éléments, qui considère ce qui est lié au corps comme sa parenté, qui fait de sa terre natale un objet de culte, et qui se rend aux lieux saints pour s’y baigner plutôt que pour y rencontrer ceux qui possèdent le savoir transcendantal, ne vaut certes pas mieux qu’un âne ou une vache. » (Bhâgavatam 10.84.13)

SYAMASUNDAR: Kierkegaard met l’accent sur le fait même de décider, et non sur la décision.

SRILA PRABHUPADA: Mais comment prendre une décision éclairée à moins de connaître le but de la vie ? Il est enfantin de dire qu’on devient éclairé en choisissant ceci ou cela. L’enfant choisit de jouer tantôt avec un jouet, tantôt avec un autre. En quoi est-il éclairé ? Les animaux prennent aussi des décisions. À titre d’exemple, l’âne décide de manger un peu d’herbe et de peiner toute la journée à porter des fardeaux. Si la décision en soi n’est guère importante, pourquoi ne choisirait-on pas la jouissance effrénée ?

SYAMASUNDAR: Kierkegaard dirait qu’elle conduit à l’ennui comme au désespoir.

SRILA PRABHUPADA: Mais ceux qui croient que tel est le but de l’existence affirment le contraire. En choisissant au gré de son caprice, on pourrait prendre n’importe quelle décision. Celui qui vit dans le Bowery pourrait décider d’acheter une bouteille de whisky dès qu’il obtient quelque argent.

SYAMASUNDAR: Kierkegaard dirait qu’il n’y a là aucun engagement à une éthique supérieure. Au stade éthique, il faut embrasser une bonne cause et prendre des décisions fondées sur celle-ci.

SRILA PRABHUPADA: Mais de telles causes sont relatives. Qui décidera en quoi consiste une bonne cause ?

SYAMASUNDAR: En anticipant la mort, nous prendrons une décision éclairée, considérant chaque action comme la dernière. Ainsi la vérité jaillira.

SRILA PRABHUPADA: Oui. L’être humain doit penser : « Je ne désire pas mourir, mais la mort s’empare de moi. Quelle en est la cause ? Que faire ? » Personne ne veut mourir, mais tous succomberont. Personne ne souhaite être malade, mais la maladie est inéluctable. Voilà des problèmes bien réels auxquels est confrontée l’humanité et qu’on ne peut surmonter en prenant quelques décisions fantaisistes. Il faut décider ainsi : « Je ne désire pas souffrir, mais la souffrance m’est imposée. Je dois maintenant trouver une solution permanente à ce problème. » Voilà une décision digne de ce nom : mettre un terme à la souffrance. Comprenons que le corps n’existe que pendant quelques années, après quoi il doit périr; que le corps est extrinsèque et que nos décisions ne doivent pas être fondées sur le corps, mais bien sur l’âme.

SYAMASUNDAR: Kierkegaard estime que l’humain dont la conscience n’est pas joyeuse est aliéné du passé comme du futur. Il souhaite oublier le passé et l’avenir n’est porteur d’aucun espoir. Quand la personnalité est intégrée à une conscience digne de ce nom, le passé et le futur sont unifiés; on peut alors prendre une décision éclairée.

SRILA PRABHUPADA: Votre décision doit s’appuyer sur le fait que vous faites partie intégrante de Krishna. Krishna informe Arjuna qu’il existait jadis et qu’il continuerait d’exister dans le futur. Notre décision doit s’appuyer sur l’existence de l’âme.

SYAMASUNDAR: Kierkegaard voit le moi unifiant le passé et le futur, établissant ainsi son intégrité en tant que tout intégré. C’est alors que le moi peut prendre des décisions.

SRILA PRABHUPADA: Ayant accédé au plan du moi, il doit accepter que celui-ci est éternel afin d’intégrer passé, présent et futur.

3) Le stade religieux:

La pratique spirituelle nécessite-t’elle de souffrir?

SYAMASUNDAR: En effet. Tel est le stade le plus haut, le stade religieux. À ce niveau, on s’engage envers Dieu et on Lui obéit.

SRILA PRABHUPADA: C’est donc le stade de la conscience de Krishna.

SYAMASUNDAR: Kierkegaard croit qu’au stade religieux règne une terrible souffrance, comparable à celle de Job.

SRILA PRABHUPADA: Pourquoi donc ? Pourquoi l’être conscient de Krishna souffrirait-il ?

SYAMASUNDAR: Kierkegaard était chrétien. Le Christ a souffert pour nos péchés, et il faut souffrir pour surmonter le péché.

SRILA PRABHUPADA: Mais cette théorie est erronée. Si le Christ est Dieu, ou le Fils de Dieu, pourquoi souffrirait-il ? Quel Dieu serait sujet à la souffrance ? Pourquoi Dieu ou l’être humain souffriraient-ils ? Le fait est que si la souffrance règne, il faut y mettre un terme. Plusieurs « chrétiens » croient qu’ayant passé un contrat avec le Christ, et parce qu’il a souffert pour leurs fautes, ils peuvent continuer de pécher. Est-ce là une philosophie cohérente ?

SYAMASUNDAR: Existentialiste, Kierkegaard croit que l’existence précède l’essence, et que pour accéder à la réalisation irituelle, il faut traverser ces différents stades.

SRILA PRABHUPADA: C’est juste. Ayant transmigrée à travers diverses espèces, l’âme parvient finalement à la forme humaine où elle peut comprendre le but de l’existence. Parvenant à la perfection, elle devient consciente de Krishna; par conséquent, l’existence précède effectivement l’essence.

SYAMASUNDAR: Pour Kierkegaard, l’engagement culmine dans la vie religieuse, dont la quintessence serait l’intériorisation de la souffrance.

SRILA PRABHUPADA: La souffrance naît de notre identification au corps. La victime d’un accident de voiture n’est peut-être pas blessée; mais parce qu’elle s’identifie à la matière, au corps, elle souffre. Toujours omniscient et transcendant de toute éternité l’Univers matériel, Dieu ne souffre jamais. La présence ou l’absence de souffrance n’est qu’une question de connaissance.

SYAMASUNDAR: Mais la pénitence et l’austérité n’entraînent-elles pas la souffrance ?

SRILA PRABHUPADA: Non. Il n’y a pas de souffrance pour les personnes au degré de savoir élevé. De toute évidence, elles peuvent ressentir quelque douleur physique. Mais réalisant de par leur vrai savoir qu’elles ne sont pas le corps, pourquoi souffriraient-elles ? Elles pensent plutôt : « Accomplissons notre devoir. Hare Krishna. » Tel est le stade supérieur. La souffrance naît de l’ignorance.

SYAMASUNDAR: Mais ne renonce-t-on pas au confort physique en servant Dieu ?

SRILA PRABHUPADA: Rûpa et Sanâtan Goswamis occupaient des postes élevés au sein du gouvernement, mais ils ont renoncé à leur richesse matérielle afin de faire preuve de compassion envers le commun des mortels. Aussi ne se vêtaient-ils que d’un seul pagne et dormaient chaque nuit sous un arbre différent. Bien sûr, des sots diraient qu’ils souffraient alors qu’en réalité, ils baignaient dans l’océan de la félicité spirituelle tout en écrivant sur les Divertissements de Krishna avec les gopîs. Absorbant leurs pensées en Krishna et les gopîs, ils rédigeaient des livres de jour en jour. Pas question pour eux de souffrance, quoiqu’un sot pourrait penser : « Ils étaient ministres, de hauts fonctionnaires qui vivaient aisément avec leurs familles et leurs résidences. Désormais sans foyer, ils ne portent plus qu’un pagne et ne mangent guère. » Un matérialiste croirait ainsi qu’ils souffraient. Or, il n’en était rien : ils étaient on ne peut plus heureux.

SYAMASUNDAR: Certains chrétiens insistent sur la valeur de la souffrance, pensant que renoncer à la vie mondaine revient à dire adieu au plaisir pour souffrir.

SRILA PRABHUPADA: À cause d’un savoir déficient. Ils ont élaboré cette philosophie plus ou moins inventée de toutes pièces après la disparition de Jésus-Christ.

(SUITE …..)



Catégories :Krishna et les philosophes, Philosophie et transcendance

%d blogueurs aiment cette page :