Comme de nos jours, à travers l’histoire de nombreux charlatans ont faussement prétendu être des incarnations de Dieu, et des adeptes naïfs les ont acclamés. Cet extrait du Livre de Krishna de Srila Prabhupada raconte le destin d’une telle incarnation de pacotille.
De tout temps, nombreux furent les sots et les criminels à se croire Dieu. C’est pourquoi l’histoire du roi Paundraka présente un intérêt certain. Car même Dieu, la Personne Suprême, Sri Krsna, présent sur Terre, il se trouva un tel insensé: Paundraka. Alors que Sri Balarama était à Vrndavana, ce Paundraka, roi de la province de Karusa, sot et vaniteux, envoya un messager à Sri Krsna, qui est reconnu comme le Seigneur Suprême. Mais le roi Paundraka, à travers son messager, Lui lançait un défi: Vasudeva, la Personne Souveraine, c’était lui-même, et non Krsna. Aujourd’hui encore abondent les disciples de ces imposteurs. De même, en son temps, nombreux furent les sots qui acceptèrent Paundraka comme la Personne Suprême. Le roi de Karusa était bien incapable de juger de sa propre position, c’est pourquoi, il se croyait Sri Vasudeva. Aussi le roi déclara-t-il à Krsna, par l’intermédiaire de son messager, qu’il était lui-même Dieu, la Personne Suprême, descendu sur Terre par sa miséricorde immotivée à seule fin de délivrer les hommes en détresse.
Paundraka et les insensés qui l’entouraient avaient conclu de leur propre chef qu’il n’était autre que Vasudeva, Dieu, la Personne Suprême. Conclusion bien puérile! Les enfants, quand ils jouent, nomment un roi parmi eux, qui se croit alors un vrai monarque. De même, bien des sots choisissent, par ignorance, un des leurs pour Dieu. Et l’élu, dans sa stupidité, se croit devenu tel, comme si le Seigneur pouvait être créé par jeu d’enfants ou par vote d’hommes. Dans cette illusion, Paundraka envoya une ambassade à Dvaraka, chargée de porter un défi à Krsna quant à Sa position suprême. Parvenu devant l’assemblée royale du Seigneur à Dvaraka, le messager transmit les paroles de son maître:
«Moi seul suis la Personne Suprême, Vasudeva. Nul homme ne peut se comparer à moi. Pris de compassion pour les âmes conditionnées, poussé à soulager leur détresse par ma miséricorde immotivée et sans fin, je suis descendu en tant que le roi Paundraka. C’est bien à tort, et sans appui autorisé que tu te poses en Vasudeva; cesse donc de répandre cette erreur. O descendant de la dynastie Yadu, abandonne ta position, abandonne tous les symboles de Vasudeva que tu t’es apropriés sans y avoir droit. Puis, viens à moi et manifeste les marques de ta soumission. Si, poussé par une impudence grossière, tu négliges mes paroles, alors un combat entre nous établira la vérité».
Lorsque le message de Paundraka fut entendu par les membres de l’assemblée royale, dont le roi Ugrasena, tous furent pris d’un long fou rire. Réjoui par leur hilarité, Krsna répondit en ces termes: «O envoyé de Paundraka, porte donc ce message à ton maître: il n’est qu’une crapule imbécile! Oui, Je le nomme crapule sans détour, et quant à lui obéir, comment peut-il croire que J’abandonnerai jamais les symboles de Vasudeva, Mon disque surtout! Ce disque, dont Je ferai usage pour tuer non seulement ton maître mais aussi toute sa suite. Ce Paundraka et tous ses compagnons, trompeur et trompés, ils vont périr de Ma main. Alors, roi stupide, il te faudra cacher ton visage en disgrâce, et lorsque Mon disque t’aura décapité, ce visage sera la proie des oiseaux mangeurs de chair, vautours, aigles et faucons. Alors, au lieu d’être Mon refuge comme tu l’as prétendu, tu seras livré à la merci de ces oiseaux impurs. Et ton corps sera jeté aux chiens, qui te dévoreront avec délice»!
Le messager rapporta les paroles de Sri Krsna à son maître, qui écouta patiemment toutes ces insultes. Sans plus attendre, Sri Krsna fit atteler son char pour châtier l’imposteur. A cette époque, le roi de Karusa vivait chez son ami le roi de Kasi. Le Seigneur cerna la capitale de ce dernier.
Le roi Paundraka, en grand guerrier, escorté de deux divisions aksauhinis, sortit de la ville dès qu’il connut l’attaque de Krsna. Le roi de Kasi, son ami, le suivit avec trois divisions aksauhinis. Lorsque les deux rois se présentèrent devant Sri Krsna pour Le défier, le Seigneur put voir pour la première fois Paundraka face à face. Le roi de Karusa s’était paré des symboles de la conque, du disque, du lotus et de la masse. Il portait l’arc Sarnga, et sur sa poitrine la marque de Srivatsa. A son cou, un faux joyau kaustubha et une guirlande de fleurs complétaient son imitation de Sri Vasudeva. Vêtu d’habits de soie jaune, portant sur son char un étendard à l’effigie de Garuda; il imitait en tous points Krsna. Sur sa tète brillait un casque de grande valeur, à ses oreilles scintillaient des pendentifs en forme d’espadon. Mais l’ensemble, vêtements et maquillage, était à l’évidence factice. Le moins subtil des hommes aurait vu la comédie, aurait démasqué l’acteur. Devant Paundraka imitant Son habit et Ses gestes, Sri Krsna ne put réprimer un grand éclat de rire satisfait.
Les soldats de Paundraka lancèrent par vagues leurs armes; tridents, masses, perches, lances, sabres, poignards et flèches, contre le Seigneur, qui les détruisit, et avec elles ceux qui les avaient lancées, soldats et assistants de Paundraka. On croyait voir l’Univers anéanti, le feu de la dévastation réduisant tout en cendres. Les éléphants, les chars, les chevaux et l’infanterie adverses furent dispersés par les armes du Seigneur. Epaves de chars et cadavres de bêtes jonchaient le champ de bataille. Chevaux, éléphants, hommes, ânes et chameaux, tout gisait à terre. Le champ de bataille dévasté ressemblait au lieu où danse Siva lors de l’annihilation du monde; mais les guerriers de Krsna s’encourageaient à cette vue et redoublaient de vaillance dans leur lutte.
Alors, Sri Krsna S’adressa à Paundraka: «Paundraka, tu M’as demandé d’abandonner les symboles de Sri Visnu et en premier lieu Mon disque. C’est maintenant que tout va se jouer. Mais attention! Tu as eu tort de M’imiter, de te dire Vasudeva. Nul n’est donc plus sot que toi»! A considérer ces paroles du Seigneur, on voit combien tout imposteur se flattant d’être Dieu n’est que le plus insensé des hommes. Et Krsna de poursuivre: «A présent, Paundraka, Je vais te forcer à renoncer à ton costume. Tu voulais que Je M’abandonne à toi: ta chance est venue. Nous allons combattre, et si tu M’imposes la défaite, Je ne manquerai point de Me soumettre à toi». Ainsi, après avoir sévèrement grondé Paundraka, le Seigneur, d’une de Ses flèches, brisa son char en morceaux. Puis de Son disque, Il lui sépara la tête du tronc, comme Indra rase de sa foudre le pic d’une montagne. Utilisant de nouveau Ses flèches, Krsna mit à mort le roi de Kasi. Puis, jeta sa tête tranchée dans la ville du roi, pour que tous ses proches, et sa famille, la voient bien. Ce fut aussi facile que pour un ouragan d’emporter un pétale de lotus. Quand Il eut ainsi fait périr sur le champ de bataille Paundraka et son ami Kasiraja, le Seigneur S’en retourna en Sa capitale, Dvaraka.
Alors, tous les Siddhas, des planètes édéniques, se mirent à chanter les gloires du Seigneur. Voici ce qu’il advint de Paundraka: puisqu’il se travestissait toujours en Sri Vasudeva, il ne cessait, d’une certaine façon, de penser au Seigneur, et il obtint donc la sarupya, l’une des cinq sortes de libération: il fut promu aux planètes Vaikunthas, où les bhaktas, dotés de quatre bras et tenant les quatre symboles, jouissent des mêmes traits corporels que Visnu. Paundraka concentrait sa méditation sur la Forme de Visnu, et tant qu’il se crut lui-même Visnu, sa méditation était une offense. Mais sa mise à mort par Krsna mit un terme à l’offense. Alors fut accordée au roi la libération sarupya, et il obtint la même forme que le Seigneur.
– Extrait du Chapitre 65 « Paundraka et le roi de Kasi libérés » du Livre de Krishna. –
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