Maîtriser ou s’abandonner à ses sens – (1/2)


  Par Jagadananda dasa


La soumission aux sens matériels et ses conséquences


Pour avoir failli à contrôler ses sens, et enfreint  les lois rigoureuses de la nature matérielle, le danger pour l’homme, ne saura pas seulement la chute dans les espèces inférieures, – selon la Bhagavad-gita, le pire danger auquel l’âme soit confrontée -, mais également avant cela, au moment de la mort, d’être emporté par les Yamadutas (SB 3.30.20) vers les planètes infernales. Là, il devra subir divers sortes de châtiments dans le but d’expier pour ses actions coupables .

                  Yamas-big.jpg  Image ci-dessus: au moment de la mort, celui qui a failli au contrôle des sens devra répondre  de  ses  actes  coupables devant Yamaraja.

Bien sûr, quand on parle d »enfer et de châtiments » (dont parlent d’ailleurs toutes les principales religions), beaucoup d’hommes dans notre société moderne haussent les épaules, incrédules et sarcastiques: « Ce sont des histoires inventées pour faire peur aux hommes et les inciter à suivre les règles imposées par les religions et Dieu », et ils ajoutent:  » L’enfer n’est qu’une pure invention, et on peut faire ce que bon nous semble, librement et sans restrictions, car tout est fini au moment de la mort ».

C’est un des défauts importants de l’âge actuel, l’ Age de Kali, la population est trés paresseuse quand il s’agit d’approfondir les questions spirituelles fondamentales ( SB 1.1.10). Les hommes de l’âge actuel sont de plus, fourvoyés, même alors qu’ils s’intéressent aux Vedas, par nombres de soi-disant enseignants et érudits des Textes védiques ( Professeurs de religion, historiens, philosophes, swamis de pacotilles,… – qui n’étudient les Vedas que du petit bout de la lorgnette, du seul point de vue spéculatif, académique ou impersonnaliste). Ceux-ci répandent partout leurs conceptions matérielles ou impersonnalistes des Vedas selon lesquelles le Mahabharata, le Ramayana, les Puranas ne sont que de beaux contes mythologiques. Ils prétendent ainsi dans leur sottise que les différents thèmes et récits qu’on y retrouve ne doivent être pris selon eux « qu’au second degré ou de façon symbolique » et non au sens littéral. Quelle méprise !! Ce que toutes ces personnes ignorent est, qu’à moins de recevoir la connaissance védique des lévres d’un maître spirituel ou acharya authentique (appartenant à la succession disciplique ou parampara remontant à Dieu Lui-même), on a toutes les chances d’être fourvoyé et de se perdre en maintes spéculations.

Et ainsi, pour revenir aux planètes infernales, tous ces beaux ergoteurs et adeptes de la spéculation mentale, considèrent celles-ci comme le reste, purement imaginaires et tenant de la mythologie. Ils égarent ainsi la population par leurs enseignements erronés. Ils montrent par là, malgré leurs diplômes et leurs titres honorifiques, qu’ils sont dépourvus d’intelligence véritable, (voir intelligence matérielle et spirituelle comparées).

L’histoire de l’humanité regorge de preuves de l’existence de l’enfer et souvent la terre elle-même devient le théâtre d’évènements historiques chargés d’horreur et de persécutions. Ainsi, toute personne sensée ne pourra nier que l’enfer dans cette existence matérielle est « à notre porte » et se manifeste de temps à autre. Les nombreux génocides ethniques, les camps de la mort, les terribles guerres avec leurs lots habituels d’atrocités – meurtres de femmes, de vieillards et d’enfants, viols, tortures, emprisonnements…- témoignent avec évidence et il ne sert à rien de jouer les autruches…l’enfer est une réalité.!

Dans l’astronomie védique la Terre est appelée planète intermédiaire, c’est à dire qu’on peut y retrouver à la fois des conditions de vie édéniques ou infernales, selon sa destinée. Donc, malgré que l’on dise avec ignorance et arrogance « je n’y crois pas », les lois de la nature agissent sous l’égide de Dieu, la Personne Suprême (BG. 9.10) et sont trés rigoureuses. Ainsi, devra-t’on payer pour ses actes impies dans cette vie et après sa mort selon les lois implacables du karma, et se rendre aux planètes infernales si ses actes le justifient. Ansi les descriptions des Ecritures védiques, dont le Srimad-Bhagavatam ( 5ème chant voir chapitre 26), qui mentionnent les lieux infernaux où sont envoyés les êtres coupables, ne sont pas mythiques et imaginaires.

En insistant sur le sujet des planètes infernales notre intention n’est pas de se joindre aux Yamadutas – le nom des êtres terrifiants qui accompagnent Yamaraja, le déva de la mort et dont la fonction est de châtier les êtres en accord avec leur karma -, de se joindre donc, aux bourreaux, non! On est rempli d’un sentiment de profonde compassion et de peine en pensant à toutes les souffrances futures qui attendent toutes les victimes des sens matériels.


      Changer ses habitudes malsaines


Il est donc urgent de mettre en garde la population égarée du Kali-yuga contre l’ignorance et le laxisme ambiant qui prévaut dans la société hédoniste actuelle et la conduit directement en enfer. Il faut donc inciter le plus de personnes possible à réformer leurs habitudes de vie malsaines (en commençant par nous-mêmes), à adopter la voie de la conscience de Krishna, le seul moyen de changer pour le meilleur sa destinée.

Le but de la conscience de Krishna est sublime et unique: briser la chaîne ininterrompue des naissances et morts répétées et retourner à la vie éternelle dans le Royaume d’amour et de félicité de Dieu. Mais pour se faire nous devons être prêts à ne pas utiliser nos sens sans discrimination et ainsi à accepter quelques inconvénients ou austérités. Ils existent quatres principes régulateurs et restrictions de base pour celui ou celle qui aspire sincèrement à développer sa conscience originelle ou conscience de Krishna: ne pas faire usage d’aucun intoxicant et alcool, ne pas s’adonner à la vie sexuelle illicite (un prochain article paraîtra dans « Retour à Krishna » pour aider à mieux comprendre cette restriction qui est, généralement, la plus difficile à comprendre), ne pas consommer de chair animale et ne pas s’adonner à la pratique des jeux de hasard.

Des sens et un mental incontrôlés, une intelligence fourvoyée sont nos pires ennemis car ils nous volent alors le bien le plus précieux de la forme humaine, la réalisation spirituelle:

bhogaisvarya-prasaktanam
tayapahrta-cetasam
vyavasayatmika buddhih
samadhau na vidhiyate 

Trop attaché aux plaisirs des sens, à la richesse et à la gloire, égaré par ces désirs, nul ne connaît jamais la ferme volonté de servir le Seigneur Suprême avec amour et dévotion. Bhagavad-gita (2.44) 

S’abstenir des plaisirs des sens reliées aux quatres activités coupables peut paraître difficile au début, car nous avons tous développé, selon différents degrés, une accoutumance à l’une ou l’autre de ces activités. Cela devient trés facile cependant dès l’instant où l’aspirant-dévot (le bhakta) en vient à expérimenter « un goût supérieur » – param dristva nivartate -, aux plaisirs des sens matériels (BG 2.59):

visaya vinivartante
niraharasya dehinah
rasa-varjam raso ’py asya
param dristva nivartate

Même à l’écart des plaisirs matériels, l’âme incarnée peut encore éprouver quelque désir pour eux. Mais qu’elle goûte une joie supérieure, et elle perdra ce désir, pour demeurer dans la conscience spirituelle.


    Le chant des Saints Noms: la plus grande aide


Ce « goût supérieur » s’obtient facilement dès qu’une personne chante ou récite le maha-mantra Hare Krishna: Hare Krishna, Hare Krishna, Krishna Krishna, Hare Hare / Hare Rama, Hare Rama Rama Rama Hare Hare, se tournant vers Dieu avec sincérité et humilité, en écoutant avec attention les vibrations du mantra, recherchant Sa protection et l’engagement dans Son service de dévotion *. Elle doit prononcer correctement le mantra, en s’efforçant de bien le prononcer et, encore une fois, de bien écouter le mantra. Ce processus du Bhakti-Yoga s’appelle techniquement Sravanam – l ’écoute – et Kirtanam – chanter ou réciter – .

* cela signifie qu’il ne faut pas chanter le maha-mantra dans un but matériel, pour obtenir des bienfaits divers d’ordre personnels (réussir à son examen, guérir telle ou telle maladie, etc…), mais bel et bien dans le but de plaire à Krishna et d’éveiller graduellement son amour de Dieu, présent à l’état latent dans son coeur, selon l’état d’esprit du Siksastakam, les prières du Seigneur Chaitanya:

na dhanam na janam na sundarim
kavitam va jagad-isa kamaye
mama janmani janmanisvare
bhavatad bhaktir ahaituki tvayi

0 Seigneur tout-puissant ! Je n’aspire nullement aux richesses, je ne rêve pas de jolies femmes et ne recherche pas non plus de disciples. Je désire uniquement m’absorber sans fin, vie après vie, dans Ton service d’amour pur et absolu

Ce processus du sravanam/kirtanam est extrêmement effectif pour la maîtrise des sens car le processus du Bhakti Yoga ou service de dévotion ne consiste pas à contenir ou réprimer artificiellement les sens mais plutôt à les utiliser positivement au service de Dieu. Ainsi dans la pratique du japa, plusieurs sens tels que la langue, l’oreille, le toucher sont engagés et deviennent graduellement purifiés et spiritualisés. On peut également engagé le sens de la vue en contemplant une image de Radha-Krishna et de Srila Prabhupada -il est toujours essentiel d’associer le maître spirituel et Krishna ensemble car on ne peut accéder à Krishna directement sans passer par la parampara. Et si l’on allume de l’encens et hume une fleur qu’on aura préalablement offerte à Krishna, avec amour et dévotion, tous nos sens deviennent alors engagés et purifiés grâce à la pratique du Bhakti-yoga. 

En prenant avantage, dans le même temps, de la compagnie des dévots de Krishna, qui sont fermement établis dans la conscience de Dieu ou conscience de Krishna, et ainsi, naturellement, engagent leurs sens dans le service du Seigneur, le bhakta acquerra très vite la force et la détermination nécessaire. Les sens et le mental apaisés, il se sentira alors trés heureux intérieurement, car comblé au niveau de l’âme. Le contrôle des sens et du mental se fera alors sans grand effort comme l’explique Srila Prabhupada (BG 3.42) dans la teneur et portée:

« Au delà du mental se trouve l’intelligence déterminante; puis au-delà même de l’intelligence, se trouve l’âme proprement dite. Et si l’âme entre en communion directe avec l’Absolu (Krishna), l’intelligence, le mental et les sens, qui lui sont subordonnés, le seront également. »  


Nous sommes « locataires » dans ce corps matériel


Il faut savoir, et c’est là malheureusement une autre grande méprise des hommes en général, que ce corps matériel ne nous appartient pas. Il est en fait la propriété de Dieu, la Personne Suprême, qui accompagne l’âme individuelle dans son coeur en tant que Paramatma, l’Ame Suprême, qui est Lui le Possesseur suprême du corps: (BG 13.23)

upadrastānumantā ca
bhartā bhoktā maheśvarah
paramāmeti cāpy ukto
dehe smin purusah parah

 Mais il est, dans le corps, un autre bénéficiaire, lequel transcende la matière; et c’est le Seigneur, le Possesseur suprême, Témoin et Consentant, qu’on nomme l’Ame Suprême.

supersoul.jpg  Paramatma, l’Ame  Suprême,
le réel propriétaire du corps

Nous sommes donc « locataires » dans ce corps matériel et non propriétaires. Mais si, dans son ignorance et sa vanité l’homme oubli ce fait et commence à se croire l’unique propriétaire et bénéficiaire de son corps il commet alors une grave erreur qui lui coûtera cher.

J’ai personnellement fait l’expérience concrète et directe des ennuis que l’on peut s’attirer lorsque l’on est locataire et que l’on se comporte plutôt comme un propriétaire.

Il y a quelques années de cela, alors que j’habitais un appartement, à Montréal au Québec, près du célèbre temple de Radha-Krishna (Radha-Manohara), rue Pie IX, j’avais un voisin, qui était l’exemple même du locataire récalcitrant. Steeve (c’était son prénom) était un consommateur invétéré de drogue. Dès les premiers jours du mois il avait dépensé son chèque du « Bien-être social » (équivalent québécois du RMI français) dans l’achat de drogues, et il n’avait plus d’argent pour payer son loyer.

Steeve avait, de sa seule initiative, décidé d’apporter quelques petites « améliorations » à son appartement. Ainsi, il avait abattu un mur de sa cuisine pour y installer un comptoir de bar, et complètement tapissé un des murs de son salon de plaques de plâtres bombées, chacune peintes de couleurs vives différentes, criardes et disparates. Alors qu’il me montrait, non sans fierté, son oeuvre, je me rappelle d’être resté figé sur place à la vue du spectacle! Plus tard le propriétaire traîna Steeve devant les tribunaux en demandant des dédommagements pour les dégâts causés à son appartement. Dédommagements qu’il obtint, et ne renouvelant pas son bail, ce locataire récalcitrant fut finalement expulsé, et plus tard, dut faire quelques jours de prison pour n’avoir pas acquitté le montant des dédommagements.

Donc, nous ne sommes que locataires et occupants provisoires de « l’habitat du corps » et Krishna, Dieu, en est le réel propriétaire (Iso 1). En tant que tel, si l’on se comporte comme Steeve, ne payant pas notre loyer au propriétaire (*1), et décidant de disposer de l’habitat d’une façon arbitraire et (*2) en détériorant celui-ci , nul doute alors que des problèmes sérieux s’en suivront.

*1).- (reprenant la métaphore:) « le loyer à payer » constitue le fait de s’engager avec amour et dévotion dans l’une ou plusieurs des neuf activités dévotionnelles offertes au Seigneur Suprême et en particulier le Yajna ou sacrifice pour cet âge, le chant des Saints Noms de Dieu, le maha mantra Hare Krishna..

*2) – (reprenant la métaphore:) s’adonner à la consommation d’intoxicants, la pratique du sexe illicite, la consommation de chair animale et l’addiction aux jeux de hasard. Par ces quatres activités pécheresses on endommage, dégrade le corps et le mental, et l’on déplaît au Propriétaire dans le corps, le Seigneur sous la forme de Paramatma.
                   SUITE « Maitriser ou s’abandonner à ses sens? »



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