Un vrai dirigeant n’est pas envieux

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Sa Divine Grâce A.C Bhaktivedanta Swami Prabhupada
Fondateur et Maitre spirituel de l’ ISKCON

Dans cette conférence donnée à Londres en juillet 1973, Srila Prabhupada, à partir du récit historique du Mahabharata, nous parle de la qualification d’un bon dirigeant: il  est concerné en premier lieu par la protection et le bien-être des citoyens. Pour cela il ne doit pas être animé d’un esprit partisan et motivé par le seul intérêt personnel et également être libre de l’envie, la grande maladie de l’existence matérielle.

L’histoire est ainsi faite qu’au sein d’une même famille, il y eut une dispute pour savoir qui occuperait le trône. Dhritarastra  était  l’héritier présomptif de la couronne du fait qu’il était le fils aîné du roi, et Pandu, son cadet. Dans de nombreux pays, le droit d’aînesse oblige l’enfant le plus âgé à occuper le trône…

Dans votre pays, l’Angleterre, l’aîné de la famille royale, la reine Elizabeth, est une fille. Elle occupe le trône. Avant elle régnait la reine Victoria qui elle-même avait succédé à une autre Elizabeth. En Inde, la femme  n’avait pas de tels droits. Selon l’opinion du plus grand politicien de l’histoire du monde, Chanakya Pandit: visvaso naiva kartavyah strisu raja kulesu ca, « Il est préférable de ne pas confier de responsabilités à un politicien ou à une femme ». La règle d’éthique générale dans la culture védique voulait que la femme reste sous la protection de son mari, de son père ou de ses enfants. Prenons l’exemple des Pandus: leur mère, Kunti, était une femme très qualifiée. Toutefois, après la mort de son mari, elle resta sous la protection de ses enfants. Lorsque ses fils et leur épouse commune, Draupadi, partirent en exil dans la forêt, elle les suivit.

Donc, Dhritarastra, qui était le fils aîné du roi, se vit refuser l’accès au trône parce qu’il était aveugle de naissance. Son frère cadet, Pandu, prit sa place mais mourut très jeune. Ses cinq fils (Yudhisthira, Bhima, Arjuna, Nakula et Sahadeva) étaient très jeunes quand leur père mourut. Les aînés de la famille, Dhritarastra et surtout Bhismadeva, s’occupèrent d’eux. Bhisma était le grand-père des Pandavas, l’oncle de Dhritarastra; il était donc trés âgé. Le royaume entier lui appartenait, mais il était resté sa vie durant célibataire et n’avait pas de descendants. Ses neveux, Dhritarastra et Pandu, étaient par conséquent ses héritiers.

A la mort de Pandu, il y eut un complot orchestré par Dhritarastra. « Ce royaume m’appartient, pensa-t’il. Mon frère est mort. Je n’ai pas pu, moi, en héritier, mais mes fils, pourquoi pas? » C’est cela la politique. Derrière des manigances politiques, on ne trouve que l’envie, la jalousie.  Telle est la nature de ce monde matériel;  c’est inévitable. Le monde spirituel est par contre à l’opposé. Il n’y a pas de politique, pas d’envie, pas de jalousie. Le monde matériel se caractérise par la politique, la jalousie, la diplomatie et bien d’autres mauvaises tendances. La politique et l’envie se trouvent également sur les planètes édéniques; il y en a aussi dans le monde animal. Telles sont les lois de la nature. « ‘Matsara » est un mot qui désigne l’envie. Un homme est jaloux d’un autre; peu importe s’ils sont frères ou membres de la même famille. Ici, Dhritarastra et Pandu étaient frère, mais l’envie était là.

Ce Mouvement pour la Conscience de Krishna n’est pas destiné à ceux qui sont animés par l’envie. Au contraire, il vise à aider la masse des gens à s’en débarrasser. C’est une science de premier ordre. Voilà pourquoi le Srimad Bhagavatam enseigne dès le début: dharma projjhita kaïtavo atra. Dans ce verset (1.1.2)  du Srimad Bhagavatam, les principes dénaturés de la religion, kaïtavo dharma, sont totalement exposés et rejetés, projjhita. Le mot utilisé « projjhita » signifie « rejeté ». Tout comme on ramasse et jette les saletés d’une pièce afin de la garder propre, on doit rejeter toute forme dénaturée de religion. A quoi bon favoriser telle ou telle religion? Toute religion où la jalousie est présente n’est pas une religion.

Penchons-nous maintenant sur le sens du mot « jalousie ». Supposons qu’on soit le propriétaire légitime d’une chose et qu’on empêche les autres de s’en emparer: il y a là de la jalousie. Ou alors vous êtes le propriétaire d’une chose et j’essaie  de me l’approprier, ou j’empêche quelqu’un de la posséder. Voilà ce qu’est la jalousie.

Alors, quel est le véritable droite de propriété de l’être vivant? C’est une chose importante à comprendre. En quoi consiste ce droit d’aînesse, ce droit du sang? En général, tout le monde doit vivre sous la protection du gouvernement. Un bon gouvernement est un gouvernement qui donne la sécurité de la vie et de la propriété non seulement aux êtres humains, mais aussi aux fourmis. Pourquoi donner refuge à son  frêre et pas aux autres? Prenons l’exemple de Maharaja Pariksit: il couvrait de sa protection tout le monde, même les animaux. Une fois, alors qu’il voyageait, il vit un homme noir essayer de tuer une vache; il se saisit aussitôt de son épée et lui demanda: « Qui est-tu? Pourquoi veux-tu abattre cette vache? »

Voilà l’exemple d’un bon gouvernement: il doit être, comme Dieu, équitable envers tous…Le roi ou le gouvernement doivent être des représentants de Dieu. Dans la culture védique, on offre au roi le même respect qu’à Dieu, la Personne Suprême. On donne au roi le nom de « nara-deva », ce qui veut dire « Dieu sous la forme humaine ». Pourquoi? Parce qu’il agit comme le représentant de Dieu. Il ne peut jalouser aucun être vivant, et particulièrement ses sujets. Voilà ce qu’on nomme « praja », c’est à dire, celui qui est né dans un endroit donné ou, en d’autres termes, qui appartient à une nation. Tel était le devoir d’un roi.

Jadis, lorsqu’il y avait un combat entre deux rois, il avait lieu pour déterminer qui donnerait la meilleure protection aux citoyens, et non pas pour que l’un ou l’autre des deux protagonistes en tire un avantage personnel. Celui qui était capable de veiller au respect de la vie, à la sécurité du peuple et à la propriété, devenait roi. Dhritarastra et ses fils étaient envieux des Pandavas. Comment auraient-ils pu protéger les citoyens? A cause de leur nature envieuse, ils ne pouvaient pas protéger les citoyens, exactement comme de nos jours, les politiciens qui, en raison de leur jalousie, ne peuvent protéger personne et n’ont d’intérêt que pour leur parti politique. Ils n’ont pas même le temps de penser à la façon de protéger les citoyens, de les aider à se sentir heureux et à penser: « Nous avons un bon gouvernement et aucune raison de nous lamenter. Nous avons assez de nourriture, assez d’aisance; nous sommes bien protégés, nous avons tout ce qu’il faut ».

Nous voyons ici que Dhritarastha est jaloux; il n’a donc pas les qualités necessaires pour bien diriger le royaume. Krishna savait cela et, avant la bataille de Kuruksetra, Il dépêcha son oncle de Dvaraka, Akrura, en lui disant: « Rends-toi à Hastinapura (Delhi) et observe ce qui s’y passe.

Akrura comprit que Dhritarastra faisait des plans; il s’adressa à lui en ces termes: « Pourquoi fais-tu tous ces plans? Krishna n’en a rien à faire ». Dhritarastra savait que Krishna était Dieu, la Personne Suprême, et sentait que les plans qu’il faisait n’étaient pas bons, mais il ne pouvait s’empêcher de les faire, pensant qu’un jour, peut-être, il plairait à Dieu par ses actes.

Tel est le comportement d’un matérialiste. Même s’il est pêcheur et sait que ce qu’il fait n’est pas correct, il ne peut s’empêcher d’agir comme bon lui semble. Le voleur, par exemple, sait très bien que s’il vole, il se sera arrêter et sera puni. Il le sait, que ce soit par les textes de loi qu’il connaît, ou pour avoir vu d’autres voleurs arrêtés et emmenés de force par la police. Il existe deux sortes d’expériences: celle que l’on fait par le biais de l’écoute et celle de la vision directe. En bengali, on appelle cela « dekha-suna », l’expérience pratique, celle qui s’obtient par la vue ou par l’écoute. L’homme intelleigent acquiert une certaine expérience seulement en écoutant de source autorisée.

En ce qui nous concerne, nous acquérons une certaine expérience sur le savoir parfait, le but de l’existence, en écoutant simplement autrui nous parler de Krishna. Voilà pourquoi nous faisons preuve de la meilleure intelligence… Ceux qui sont très pécheurs ne peuvent s’empêcher de pécher même lorsqu’ils entendent ou voient les conséquences que cela peut entraîner. Dhritarastra, par ses actes pécheurs, était devenu si déchu qu’il ne  voulait écouter  aucun conseil, ni ceux de Vidura, ni ceux de Bhisma. Ils lui avaient pourtant expliqué longuement que les Pandavas étaient les véritables héritiers du trône et qu’il ne devait donc pas profiter de leur position de faiblesse. Mais Dhritarastra était résolu dans ses plans. Une fois ses plans mis au grand jour, le champ de bataille fut établi à Dharma-ksetre kuru ksetre (note: référence au premier verset de la Bhagavad-gita); « dharma-ksetre » signifie « le lieu de la religion ». Ce n’est pas un endroit imaginaire comme le disent certains commentateurs sans scrupules qui expliquent que « Kuruksetra » veut dire « le corps ». Non, absolument pas imaginaire! Essayez de comprendre la Bhagavad-gita telle qu’elle est. Kuruksetra est le lieu de la religion, car Krishna y est présent. Sur ce champ de bataille de Kuruksetra, Krishna donne des directives à Arjuna. Voilà pourquoi il s’agit d’un dharma-ksetra…



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