Au delà du mental – 1ère Partie

En notre époque d’angoisse, nombreux sont ceux qui recherchent la paix intérieure. Mais leur quête ne peut que rester inaboutie, tant qu’elle n’atteint pas le plan spirituel, le plan de l’âme, au-delà du corps physique, du mental et de l’intelligence. C’est ce qu’explique Srila Prabhupâda dans un entretien à Los Angeles avec le psychologue Gérald Frazer.

Dr Frazer: Que faites vous quand un de vos étudiants a un problème physique ou émotionnel? Je suis curieux de le savoir. L’aidez-vous à résoudre ce problème, en l’amenant à s’élever au-delà?

Srila Prabhupada: Oui. Nous attaquons le mal d’un point de vue purement spirituel, et non physique, ni mental ou intellectuel. Nous reconnaissons en effet quatre niveaux de conscience; le niveau physique, ou sensoriel; ensuite, plus élevé encore le niveau mental; plus élevé encore le niveau intellectuel; et finalement, le niveau spirituel.

Au premier niveau, notre perception directe utilise les sens (indriyâni parâny âhuh (Bhagavad gîtâ 3-42). Par exemple, je vois présentement de mes yeux votre magnétophone – c’est le plan sensoriel. Mais si vous me le décrivez, alors c’est par le mental que j’en perçois l’image. Ces deux niveaux de vision différent. Lorsqu’un chercheur électronique pense à la façon de perfectionner le système d’enregistrement, il s’établit au niveau intellectuel; c’est encore une autre vision. Ainsi, rien que sur le plan matériel, on distingue trois niveaux: sensuel, mental et intellectuel. Au delà se trouve le plan spirituel. Il est le plus élevé; c’est là que siège lâme, et qu’elle perçoit le monde extérieur par l’intermédiaire des sens, du mental et de l’intelligence matériels.

Quand surgit un problème, nous l’attaquons donc à partir du pont de vue spirituel. Nous savons en effet qu’un être spirituellement sain le sera aussi intellectuellement, mentalement et physiquement. Telle est notre philosophie: possédant cent dollars, vous en possédez du même coup cinquante, vingt ou dix. C’est pourquoi nous donnons à nos étudiants une formation spirituelle. Elle consiste d’abord à se lever tôt, prendre une douche, et ne manger que du Krishna- prâsâdam; ils doivent aussi apprendre à restreindre leurs sens en pratiquant l’abstinence sur des points bien précis. Leurs problèmes physiques et leurs problèmes d’hygiène se trouvent de cette façon naturellement résolus. Nous ne dépensons guère en frais médicaux. Au cours des sept dernières années, en ce qui me concerne, je n’ai pas consulté un seul médecin. Et en général, nos étudiants ne souffrent pas de désordres physiques.

Une bonne santé dépend en effet de l’état de l’âme dans le corps. Un corps sans âme ne respire plus, et tombe très vite en décomposition. L’âme, quand elle quitte le corps, laisse un cadavre; car l’être n’est vivant que tant qu’une âme l’anime. Aussi importe-t-il de toujours garder la santé spirituelle, condition de la santé intellectuelle, mentale, et physique. Mais avant de pousser plus loin cet entretien, j’aimerais savoir si vous concevez une âme.

Dr. Frazer: J’utilise en effet le concept de l’âme.

Srila Prabhupada: Et comment la définissez-vous?

Dr. Frazer: Je ne saurais exprimer en mots tout à fait clairs le fond de ma pensée là-dessus. Disons que l’âme est en quelque sorte l’essence de notre être, commune à nous tous, indescriptible et ineffable.

Srila Prabhupada: Je ne vois guère là d’explication ; plutôt une définition négative. Or à moins d’une perception et d’une connaissance positives de l’âme, on ne saurait parler de savoir spirituel.

Dr. Frazer: Si j’essaie de vous comprendre, lorsque vous parlez de l’âme, vous semblez faire allusion à ce que je ressens de mon être lorsque mes sens corporels sont en repos?

Srila Prabhupada: Les sens et l’action qui leur est liée dépendent de la présence de l’âme spirituelle. Si vous bougez la main, c’est uniquement parce qu’elle est en vous. Le corps qu’elle quitte devient une masse de chair inerte.

Dr. Frazer: La matière est donc distincte de l’âme spirituelle?

Srila Prabhupada: Oui. L’âme est la force vitale, source de l’action qui vous anime, qui m’anime, qui anime tous les êtres de la fourmi à l’éléphant.

Dr. Frazer:  Reste-t-elle dans le corps après la mort?

Srila Prabhupada: L’état de mort signifie que vous avez quitté le corps. Cependant, maintes âmes y demeurent présentes, dans une infinité de microbes, parasites et autres êtres microscopiques. En ce moment même, d’innombrables êtres habitent votre corps.

Dr. Frazer: Des âmes individuelles?

Srila Prabhupada: Oui. Comme vous et moi. Chaque être se distingue de tous les autres.

Dr. Frazer: Mais ces âmes ont bien toutes quelque chose en commun?

Srila Prabhupada: Elles sont de même nature. Vous et moi, par exemple, en tant qu’êtres humains, nous possédons les mêmes caractéristiques – deux mains, deux jambes, et ainsi de suite. Et cependant, nous sommes distincts l’un de l’autre. Telle est l’individualité. L’entendement de ces vérités premières relève de la Conscience de Krishna.

Dr. Frazer: Pour revenir à la question initiale, il doit bien arriver qu’une personne vienne à vous en proie à un problème, disons physique ou mental, et ne puisse accéder au plan spirituel. Sans doute l’aidez-vous à le faire?

Srila Prabhupada: Oui, c’est là le but du Mouvement pour la Conscience de Krsna. Celui qui s’élève à la Conscience de Krsna voit ses problèmes disparaître tout naturellement, qu’ils soient d’ordre physique, mental ou intellectuel.

Dr. Frazer:  Je suis particulièrement curieux de connaître la méthode avec laquelle vous amenez celui qui entre en contact avec vous à devenir conscient de Krishna. Utilisez-vous une « thérapie » particulière?

Srila Prabhupada: Bien entendu. De même que vous administrez des soins psychiatriques à vos patients, nous guérissons grâce à la Conscience de Krishna.

Dr. Frazer: Pourriez-vous préciser la nature des soins employés?

Srila Prabhupada: Ils consistent à chanter le maha- mantra Hare Krishna. Cette pratique ressemble à celle qu’on utilise en Inde, pour guérir la morsure d’un serpent venimeux. Il existe encore de nos jours des charmeurs de serpents qui savent ranimer peu à peu la victime d’une morsure en chantant un certain mantra. Ce mantra produit un effet de cure au niveau matériel. Pareillement, l’âme, de nature spirituelle, se trouve, lorsqu’un corps de matière la recouvre, affectée de troubles psychologiques ou physiques. A chanter Hare Krsna, nous éveillons en nous la conscience de notre nature spirituelle, et cette conscience nous délivre de nos limites physiques, mais aussi mentales et intellectuelles.

Dr. Frazer: Il semblerait qu’une certaine mentalité préalable soit requise pour que le chant Hare Krsna exerce ses bienfaits.

Srila Prabhupada: Non. Ce chant crée à lui seul l’état de santé spirituelle. Nous chantons, et demandons à ceux qui sont malades en esprit de se joindre à nous. Ils sont alors guéris de tous leurs maux.

Dr. Frazer: Beaucoup refuseraient cette cure. Beaucoup préfèrent chercher dans autrui la solution à leurs souffrances, et non en eux-mêmes, par quelque procédé de concentration intérieure ou chant. Ils n’ont pas l’habitude de rentrer en eux-mêmes.

Srila Prabhupada: Néammoins, nombre de nos étudiants ont été guéris de tous leurs problèmes par ce simple chant. Vous pouvez les interroger.

Dr. Frazer: Après avoir parcouru la voie qui conduit à la Conscience de Krsna, vos étudiants demeurent-ils dans le temple, ou retournent-ils à la société, pour se livre à des occupations régulières?

Srila Prabhupada: Quelques-uns d’entre eux travaillent à l’extérieur. Cet étudiant (désignant un dévot) est docteur en chimie. Il fait son travail, mais sans perdre de vue la Conscience de Krishna. Et bien d’autres, dans notre Mouvement, exercent une activité professionnelle. Il n’est pas nécessaire de vivre dans un temple pour rester conscient de Krishna, bien que ce soit plus facile, à cause de la compagnie des bhaktas; vivre avec d’autres dévots de Krishna est d’une importance primordiale.

Dr. Frazer: Enseignez-vous la maîtrise du corps?

Srila Prabhupada: Oui. Ne pas consommer de chair animale, ne s’adonner à aucune forme d’enivrement, à aucune activité sexuelle illicite, non plus qu’aux jeux de hasard. Telles sont les règles fondamentales de cette maîtrise, qui comprend, outre les restrictions, de nombreuses prescriptions. Nos étudiants ne vont pas au cinéma, ni au restaurant. Ils ne fument pas et ne boivent ni thé, ni café – aucun excitant. Double économie, sur les substances elles-mêmes, et sur les frais médicaux qu’elles entraînent.

Dr. Frazer: Vous avez mentionné une restriction concernant des activités sexuelles illicites. Quand donc l’acte charnel est-il permis?

Srila Prabhupada: Avant tout, il ne faut avoir de rapports sexuels qu’avec son épouse légitime: donc être marié; l’union charnelle ne doit se produire qu’une fois par mois, pas plus, et quand la femme est fécondable, c’est-à-dire après les menstruations. Enfin lorsqu’elle est enceinte, toute activité sexuelle doit cesser. Voilà ce qui est permis.

Dr. Frazer: Sanctionnez-vous les relations illicites?

Srila Prabhupada: La punition viendra d’elle-même, par les lois de la nature. Dès que vous les violez, vous devez en subir les conséquences. Par exemple, si vous mangez plus que nécessaire, vous souffrez; c’est la loi. Si vous vous adonnez outre mesure aux plaisirs de la chair, vous vous affaiblirez, jusqu’à devenir impuissant. Mais surtout, si vous vous laissez aller à enfreindre ces interdits – relations sexuelles illicites, enivrement, consommation de chair animale et jeux de hasard – vous ne comprendrez jamais ce qu’est la conscience spirituelle. Il n’y a pas plus grand châtiment. Car, privé de cette conscience, vous resterez à l’état animal, dans l’ignorance. Vous avez eu la fortune d’obtenir un corps d’homme, et vous vous comportez en animal. N’est-ce pas la plus grande des malédictions?

Dr. Frazer: Je suppose que oui, mais l’ignorance engendre l’ignorance, comment y mettre un terme?

Srila Prabhupada: Dès que vous comprenez Dieu, votre connaissance devient parfaite. Elle reste imparfaite tant que vous ne Le comprenez pas. L’on ne peut enseigner la connaissance de Dieu qu’aux hommes, pas aux animaux. Voilà pourquoi l’humanité connaît tant d’Ecritures. Celui qui ne profite pas de la vie humaine pour approcher Dieu se condamne à l’animalité.

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